Sur les traces arméniennes

Julien Demenois et Anne Heurtaux cherchent, du Liban à l’Inde, trace des vestiges et des peuplements arméniens.


Genèse du projet


Parcourir les routes de la soie, du Liban à l’Inde, via l’Asie centrale, en quête des vestiges et des peuplements arméniens.

Il n’est certes pas très original, pour des voyageurs, de caresser l’idée de fouler un jour les routes de la soie, mais ô combien séduisante est cette perspective ! Entre les débuts de l’élevage du bombyx du mûrier pour son cocon transformé en fil de soie, au IIIe millénaire avant J.-C. en Chine, et la production des carrés Hermès aujourd’hui en France, nombreux ont été les pèlerins, les marchands et les voyageurs à avoir arpenté ces routes mythiques ? Depuis notre découverte, en 2000, des paysages minéraux, colorés et acérés des montagnes du Ladakh, l’idée nous trottait dans la tête de voir un jour la vie qui se cache de l’autre côté des montagnes, de sentir en arrivant de l’ouest, comme l’écrivit Nicolas Bouvier dans L’Usage du monde, « par bouffées l’odeur mûre et brûlée du continent indien ».
« Un voyage à toute vitesse est du temps perdu parce qu’on ne peut rien voir. » Aussi, suivant l’adage de Jules Crevaux dans Le Mendiant de l’Eldorado, avons-nous décidé de faire une parenthèse d’un an et demi dans notre vie pour prendre le temps de voyager. Fonctionnaires tous deux, nous avons la chance de pouvoir nous arrêter de travailler quelque peu, en ayant l’assurance de retrouver un poste à notre retour. Nous avons saisi cette chance, et décidé de mettre à nouveau notre sac sur le dos pour partir vagabonder, sans contrainte, pendant seize mois.
Si les contrées minérales et rocailleuses des routes de la soie allaient de soi, après cinq années passées dans le charme organique de la Guyane, encore fallait-il trouver le fil rouge qui nous mènerait de Marseille jusqu’à Mumbai, l’ancienne Bombay. Le thème des traces arméniennes est apparu comme une possibilité, non pas que 2007 soit celle de l’Arménie – curieuse coïncidence –, mais plutôt que l’un de nous deux est petit-fils d’Arméniens, immigrés dans le sud de la France à la suite du génocide de 1915. Et puis, lors de précédents voyages en Inde, au Bangladesh et en Éthiopie, nous avions été étonnés de trouver des traces de présence arménienne : églises, inscriptions sur des tombes, association sportive… Ces traces étaient révélatrices d’une présence passée, remontant précisément aux routes du commerce, mais aussi actuelle. Bien qu’ayant une certaine arménité en nous, c’est-à-dire le sentiment d’être lié à la communauté arménienne, mais connaissant finalement peu cette culture, ce « fil rouge » allait nous permettre d’en apprendre aussi davantage sur nous-mêmes. Nous pensons que ce regard porté sur les traces arméniennes, et extérieur à la diaspora, peut constituer pour elle l’occasion de mieux connaître sa culture séculaire et sa diversité, du Moyen-Orient à l’Asie.

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