Le tour de l’Europe de l’Ouest à pied

     


François Aubineau et Florent Mercier ont découvert l’Europe de l’Ouest à pied.


3. Alpes


C’est le 17 août que nous rencontrons les Alpes. Amicalement, doucement. Il ne s’agit pour l’instant que d’accéder aux hauts plateaux du Vercors. Comme si ces majestueuses montagnes voulaient nous apprivoiser, nous laisser le temps de nous habituer à elles.
Nous évoluons en terrain plat. Toutefois les falaises qui nous entourent et la végétation – herbe rase et, çà et là, quelques sapins – ne laissent aucun doute sur le caractère montagneux de la région. L’aridité du milieu détermine notre itinéraire, établi en fonction des rares sources. Sur les plateaux, le vert domine, à peine contrebalancé par la blancheur floconneuse des troupeaux de moutons. Nous rencontrons Cathy, qui tient l’estive de juin à octobre. Nous l’aidons à installer la clôture et à parquer ses bêtes avant la tombée de la nuit. Suit une longue conversation sur le retour des loups dans le Vercors : les craintes des bergers, mais aussi leurs espoirs ; les efforts de l’organisme Life qui prend en charge les frais liés à la protection des troupeaux.
Nous quittons le Vercors en empruntant le col Vert, à 1 766 m d’altitude, et passons au sud de Grenoble pour rejoindre la chaîne de Belledonne. Une longue ascension dans de grandes forêts ; de nombreux lacs, une roche omniprésente, souvent couverte de lichen ; des cours d’eau qui éclatent en cascades. Cet univers bleuté, presque froid dans sa minéralité, a quelque chose d’étrangement apaisant, comme la promesse d’un autre monde.
27 août, au matin. Là-haut, le col de la Mine-de-Fer, à 2 400 m d’altitude. Tout au long de la montée qui y mène, des moutons nous précèdent, nous ralentissent parfois. Par moments, nous devons les pousser tant ils semblent décidés à nous garder en bas ! Lorsque la pente devient trop raide, ils nous abandonnent enfin. Nous sortons du GR à nos risques et périls. Le but de la manœuvre est d’éviter un long détour qui cumule montées et descentes. Il s’agit d’attraper un col, 100 m plus haut, pour ensuite descendre directement jusqu’à un village. Après une éprouvante escalade, voilà le col : la vue, ouverte sur le massif des Grandes-Rousses et sur la montagne des Sept-Laux nous retient un long moment. La descente n’est pas de tout repos. Nous décrouvrons en chemin une carcasse d’avion, vaguement inquiétante. Mais le village nous attend en contrebas.
De longues étapes de route s’enchaînent ensuite. Bitume et pluie fine, vallée de la Tarentaise, vallée de la Maurienne avec, comme horizon, le Beaufortin. Nous faisons une rencontre inattendue : un groupe d’étudiants américains qui parcourent la France et l’Italie à pied. Escale de trois jours fort appréciée, chez Mireille et Jean. Nous traversons le Beaufortin sous la neige. À travers l’épais brouillard, nous entendons un bruit familier, vaguement d’abord : « Tu entends ? » Puis, nous le reconnaissons tout à fait : « Une machine à traire ! » Xavier et Valérie sont en train de traire leurs Abondances et leurs Tarines. Nous passons la soirée avec eux, apprenant tout sur le Beaufort et sur sa production. Le 7 septembre, nous quittons la France. Quelques jours de transit en Italie – val Veri et val Ferret. Nous voilà au pied du col du Grand-Ferret. Demain nous marcherons en Suisse.

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