Collection « Visions »

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Couverture
Sulawesi et Bali :

« Les Balinais pratiquent une religion où se mêlent des éléments issus de l’hindouisme, du bouddhisme, du culte des ancêtres et d’une infinité de divinités et de démons locaux. Ce culte, qui ne ressemble qu’à lui-même, occupe tous les aspects de la vie. Dès le matin, les femmes préparent des offrandes très simples. Elles tressent des feuilles de palmes pour former de petites corbeilles où elles disposent quelques grains de riz et des pétales de fleurs. Pour calmer les esprits démoniaques, elles disposent ces présents sur le sol aux endroits où le monde des humains rencontre celui de ces êtres invisibles : à la croisée des chemins, devant les portes, sous un arbre, dans la voiture… À chaque fois, elles font un geste lent de la main, d’une extrême douceur, que ce soit pour asperger les offrandes d’eau bénite ou pour guider la fumée des bâtonnets d’encens, afin qu’elle emporte l’essence du don vers ses destinataires. Ailleurs, les offrandes sont destinées à des divinités dont il faut s’attirer la bienveillance. Dans ce cas, elles sont placées en hauteur, sur un autel de bambous ou de pierres. Il y a ensuite les grandes offrandes colorées, véritables œuvres d’art, celles qui demandent des jours et des jours de préparation minutieuse avant d’être emportées au temple, souvent en procession. Le temps passé à les fabriquer n’a aucune importance. L’œuvre de création est déjà en soi un cadeau aux dieux. Ce qui compte c’est donc sa beauté, celle qui pourra séduire et remercier ces maîtres du monde invisibles avec qui les humains partagent l’île de Bali. Le “Tout-Puissant”, Sang Hyang Widi Wasa, a offert aux hommes une nature généreuse et belle qui permet la vie. Les hommes rendent sous forme d’offrandes ce qui leur a été donné. C’est ainsi que l’équilibre fondamental entre dieux et démons, bon et mauvais, humain et divin, et toutes les forces opposées et complémentaires, est préservé. La beauté est source d’harmonie. Les Balinais l’ont compris, et c’est pour cela que Bali continue à faire rêver.
J’ai longtemps estimé que tous les rituels quels qu’ils soient étaient une imposture, tant je les trouvais vides de sens. Au cours de mes voyages, j’en ai vu des dizaines, j’ai même participé à des rites qui étaient chargés d’émotion. Mais je dois dire que les célébrations organisées pour la venue des divinités ou des ancêtres dans les sanctuaires de Bali surpassent en beauté tout ce que j’ai vu. Ces odalan ont lieu chaque année balinaise, qui compte deux cent dix jours, lors de l’anniversaire de la fondation du temple, souvent au moment de la pleine lune. Après une semaine d’intense activité pour préparer les offrandes et embellir le lieu d’ordinaire désert, tout est enfin prêt. Dans l’après-midi, des processions se forment. Les femmes, regroupées par quartiers, pénètrent en file indienne dans le temple, portant sur la tête les hautes offrandes colorées qui seront le festin des dieux. Elles traversent deux cours puis, après quelques marches, arrivent dans l’enceinte la plus haute, la plus sacrée. Un pavillon abrite déjà des dizaines de pyramides délicates composées de fruits, de gâteaux de riz et de fleurs dont le parfum à lui seul est déjà une invite à la fête. Peu avant la tombée du jour, les fidèles arrivent, parés de leurs plus beaux habits. Déjà l’air vibre au son du gamelan. Le prêtre, assis en lotus sous un pavillon noyé dans les volutes d’encens, murmure des mantras et convie les divinités à venir parmi les hommes. Les fidèles s’assoient face aux autels, mains jointes au-dessus du front, une fleur au bout des doigts. Un prêtre asperge chacun d’eau sacrée, puis distribue le riz béni qu’on applique sur ses tempes. Des danses gracieuses accueillent les divinités car à Bali ces chorégraphies sont aussi un rite, une offrande, un spectacle pour les dieux. La fête durera trois jours pleins. Il y aura d’autres spectacles, sacrés ou profanes, il y aura peut-être aussi des transes, des combats de coqs. On s’amusera et on rira pour que se resserrent les liens qui unissent tous les habitants du village entre eux et avec leurs dieux. Ces derniers retourneront ensuite vers les cieux et le temple redeviendra désert. Quels sont ces voyageurs blasés qui racontent que Bali a perdu son âme ? »
(p. 100-103)

De Sumatra à Bornéo (p. 50-53)
Des petites îles de la Sonde à la Papouasie occidentale (p. 116-119)
Extrait court
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