Collection « Petite philosophie du voyage »

  • Défis de la course (Les)
  • Écho des bistrots (L’)
  • Quête du naturaliste (La)
  • Instinct de la glisse (L’)
  • Vertiges de la forêt (Les)
  • Voyage en famille (Le)
  • Tao du vélo (Le)
  • Parfum des îles (Le)
  • Appel de la route (L’)
  • Bonheurs de l’aquarelle (Les)
  • Euphorie des cimes (L’)
  • Malices du fil (Les)
  • Ivresse de la marche (L’)
  • Force du silence (La)
  • Secret des pierres (Le)
  • Frénésie du windsurf (La)
  • Prouesses de l’apnée (Les)
  • Vie en cabane (La)
  • Fureur de survivre (La)
  • Art de la trace (L’)
  • Voyage dans l’espace (Le)
  • Ronde des phares (La)
  • Frisson de la moto (Le)
  • Légèreté du parapente (La)
  • Poésie du rail (La)
  • Hymne aux oiseaux (L’)
  • L’Engagement humanitaire
  • Grâce de l’escalade (La)
  • Temps du voyage (Le)
  • Vertu des steppes (La)
  • Facéties du stop (Les)
  • Cantique de l’ours (Le)
  • Esprit du geste (L’)
  • Écriture de l’ailleurs (L’)
  • Rythme de l’âne (Le)
  • Chant des voiles (Le)
  • Liberté du centaure (La)
  • Tour du monde (Le)
  • Fièvre des volcans (La)
  • Extase du plongeur (L’)
  • Tentation du jardin (La)
  • Vie à la campagne (La)
  • Murmure des dunes (Le)
  • Goût de la politesse (Le)
  • Caresse de l’onde (La)
  • Magie des grimoires (La)
  • Audaces du tango (Les)
  • Simplicité du kayak (La)
  • Voyage immobile (Le)
  • Attrait des gouffres (L’)
  • Soif d’images (La)
  • Mémoire de la Terre (La)
  • Enchantement de la rivière (L’)
  • Prodige de l’amitié (Le)
  • Promesse de l’envol (La)
  • Mystères du vin (Les)
  • Religion du jazz (La)
  • Charme des musées (Le)
  • Triomphe du saltimbanque (Le)
  • Sortilèges de l’opéra (Les)
  • Âme de la chanson (L’)
  • Sérénité de l’éveil (La)
  • Arcanes du métro (Les)
Couverture
Désir d’ensauvagement du monde :

« Il y a bien des manières d’envisager l’équitation : de manège, de haute école, de saut d’obstacles, de dressage, de loisir, d’extérieur… Il y a bien des manières d’être avec les chevaux : chevaux de club qu’on voit seulement pour les monter, chevaux de propriétaires dans de chaudes écuries – brossés quand on arrive, parfois même sellés –, chevaux de chasse qu’on loue tout prêts au “point de rendez-vous”, chevaux qu’on a chez soi dans un pré pour la promenade du week-end ou bien même immontables…
Il y a une progression sans doute : comme tout le monde, j’ai commencé à tourner en rond en manège sur des chevaux de club, dits à juste titre chevaux d’école, ceux qui vous pardonnent votre manque d’assiette, qui font mine de ne pas sentir votre peur et vous éduquent avec de petits refus, de petites mises en garde. J’avais 10 ans. Puis j’ai appris l’équilibre. La relation de tout cavalier à son cheval est faite en premier lieu d’équilibre. Il y a l’équilibre naturel du cheval. L’écuyer Étienne Beudant écrit dans Extérieur et haute école que le “cheval en liberté est toujours en équilibre”. Mais il l’est plus ou moins. Comme il y a des êtres humains plus ou moins adroits, il y a des chevaux plus ou moins équilibrés ; certains trébuchent sans arrêt, et le cavalier-voyageur cherche toujours, lorsqu’il est en quête de son compagnon de voyage, un cheval “au pied sûr”, c’est-à-dire qui possède le meilleur équilibre naturel possible, car celui-ci sauvera peut-être la vie de quelqu’un, la sienne d’abord, et parfois aussi celle de son cavalier. À cet équilibre naturel s’ajoute l’équilibre du couple cheval-cavalier, malaisé à trouver car il s’agit que l’équilibre de l’un se confonde avec celui de l’autre… J’ai appris que cette masse mouvante au-dessous de mon corps imposait des modifications à mon propre équilibre. Et j’ai appris à être avec et dans cet équilibre à deux. Cette notion constitue donc les prémices de toute centaurisation à venir. Enfin est venu le temps de l’extérieur : comme tous les cavaliers, j’ai appris qu’un cheval galope parfois vite, que les arbres sont dangereux, que le cheval n’est pas un être docile… J’ai appris à en avoir peur, j’ai appris à maîtriser l’animal et ma peur, et j’ai appris à faire confiance à celui qui me porte. On peut aimer randonner en s’en remettant à des professionnels qui organisent pour vous des étapes, plus ou moins douillettes, plus ou moins longues. On peut préférer la haute école et le silence feutré des manèges où l’image du couple cheval-cavalier se réfléchit dans les miroirs. J’aime aussi ces tête-à-tête silencieux. Mais je rêvais d’autre chose. Je rêvais d’ajouter à l’art de faire cœur avec le dos pensant du cheval, la joie de parcourir. Je rêvais de cette liberté solitaire, je rêvais d’excursion et d’extase, si excursion renvoie bien à l’idée de “courir hors de”, et extase à celle d’être “hors de soi-même”. Oui, le cavalier-voyageur se distingue des autres cavaliers dans son désir de partir au-devant du monde, de sortir hors des remparts rassurants de son univers. Il y a en lui un désir de steppe, un désir de vent, qui est essentiellement un besoin de s’affranchir de la polis, des contraintes et des lois de la Cité. Le cheval dont il rêve est le cheval de guerre, celui qui, d’Alexandre à Gengis Khan, et jusqu’à Napoléon, a permis à l’homme de conquérir l’espace bien au-delà de ce qu’il pouvait imaginer, jusqu’à ces terræ incognitæ qui étaient aux confins de son univers connu. L’Asie pour Alexandre, l’Occident pour Gengis Khan, la Russie ou l’Égypte pour Bonaparte. Ce cheval d’arme, je l’ai trouvé quant à moi dans l’akhal-téké, le coursier des steppes d’Asie centrale, celui qui, depuis des millénaires, a fait la réputation des armées perses, le cheval des Scythes et des Massagètes, qui, par sa valeur, a attiré les maîtres du monde, des empereurs de Chine aux pharaons d’Égypte en passant bien sûr par les Grecs. Ce cheval incarne pour moi le vent des steppes, le goût de la liberté et des terres lointaines, l’aspiration à atteindre les confins. Car le cavalier au long cours est un homme de cheval et un voyageur, pour qui l’excursion est d’abord un désir d’ensauvagement du monde. Ce que d’aucuns appellent “le goût de l’aventure”. »
(p. 18-22)

L’ascension spirituelle (p. 60-64)
Une forme de centaurisation (p. 69-73)
Extrait court
© Transboréal : tous droits réservés, 2006-2024. Mentions légales.
Ce site, constamment enrichi par Émeric Fisset, développé par Pierre-Marie Aubertel,
a bénéficié du concours du Centre national du livre et du ministère de la Culture et de la Communication.