Prologue ~ De l’océan à la montagne :
« Ce jour-là, une piste forestière me conduisit au col de la Serre-du-Cot. De là, sortant de la forêt, je longeais l’arête sur quelques centaines de mètres avant d’être empêtré dans la neige. Alors, je descendis vers la vallée par un autre sentier. Sur un arbre, une marque : deux traits superposés, un blanc au-dessus d’un rouge. Une balise de sentier de grande randonnée. À sa vue, un flot de souvenirs m’assaillit : les lacets descendant à travers la forêt, un bourbier à contourner et, plus loin, les granges ruinées. À chaque pas, les détails du parcours émergeaient de ma mémoire avec une précision incroyable. Ceux de cette descente bien entendu, mais aussi ceux de l’ensemble de la route de l’Atlantique à la Méditerranée. Plus de 1 000 kilomètres parcourus quelques mois plus tôt sur le GR10, en quarante-sept jours. Les souvenirs de cette vadrouille déferlaient comme la houle sur une plage lors des tempêtes d’équinoxe. L’émotion me submergea. Un sentiment incontrôlable, inexplicable, disproportionné.
Car cette randonnée avait été bien plus qu’un jeu de piste consistant à repérer et suivre des balises. Bien plus qu’une succession de journées de marche en pleine nature, bien plus qu’un tracé qui s’allongeait sur la carte. Me remémorer ces semaines de voyage, c’était m’extasier devant un trésor, un joyau à la beauté difficile à comprendre. Car si l’excursion avait été empreinte de sérénité, une multitude de détails avait laissé une impression complexe, à peine avouable : un mélange de jours heureux baignant dans le sublime, une communion constante avec la montagne. Cette symbiose avec la grande dame pyrénéenne prenait maintenant un nouvel élan : même les hêtres séculaires semblaient accueillir mon retour, leurs branches écartées, comme disposés à me donner l’accolade. Je poursuivis la descente dans la joie, guilleret, assez ému de renouer ce lien charnel. Je me laissai porter par le souvenir, même plus étonné de connaître les détails de ce sentier, comme si je l’avais pratiqué maintes fois. J’eus l’impression que chaque particularité du millier de kilomètres parcouru s’était imprimée dans ma mémoire, comme mes pieds avaient laissé leur empreinte sur les chemins, à chaque pas. En m’installant en Ariège, c’est cette nature que je suis venu retrouver, celle qui, quelques mois auparavant, m’avait offert sept semaines d’aventure. »
Depuis la côte basque ~ la randonnée itinérante (p. 28-34)
À travers le Biros ~ résurgence du passé (p. 117-121)
Crète de la Bède ~ la beauté du voyage (p. 162-166)
« Ce jour-là, une piste forestière me conduisit au col de la Serre-du-Cot. De là, sortant de la forêt, je longeais l’arête sur quelques centaines de mètres avant d’être empêtré dans la neige. Alors, je descendis vers la vallée par un autre sentier. Sur un arbre, une marque : deux traits superposés, un blanc au-dessus d’un rouge. Une balise de sentier de grande randonnée. À sa vue, un flot de souvenirs m’assaillit : les lacets descendant à travers la forêt, un bourbier à contourner et, plus loin, les granges ruinées. À chaque pas, les détails du parcours émergeaient de ma mémoire avec une précision incroyable. Ceux de cette descente bien entendu, mais aussi ceux de l’ensemble de la route de l’Atlantique à la Méditerranée. Plus de 1 000 kilomètres parcourus quelques mois plus tôt sur le GR10, en quarante-sept jours. Les souvenirs de cette vadrouille déferlaient comme la houle sur une plage lors des tempêtes d’équinoxe. L’émotion me submergea. Un sentiment incontrôlable, inexplicable, disproportionné.
Car cette randonnée avait été bien plus qu’un jeu de piste consistant à repérer et suivre des balises. Bien plus qu’une succession de journées de marche en pleine nature, bien plus qu’un tracé qui s’allongeait sur la carte. Me remémorer ces semaines de voyage, c’était m’extasier devant un trésor, un joyau à la beauté difficile à comprendre. Car si l’excursion avait été empreinte de sérénité, une multitude de détails avait laissé une impression complexe, à peine avouable : un mélange de jours heureux baignant dans le sublime, une communion constante avec la montagne. Cette symbiose avec la grande dame pyrénéenne prenait maintenant un nouvel élan : même les hêtres séculaires semblaient accueillir mon retour, leurs branches écartées, comme disposés à me donner l’accolade. Je poursuivis la descente dans la joie, guilleret, assez ému de renouer ce lien charnel. Je me laissai porter par le souvenir, même plus étonné de connaître les détails de ce sentier, comme si je l’avais pratiqué maintes fois. J’eus l’impression que chaque particularité du millier de kilomètres parcouru s’était imprimée dans ma mémoire, comme mes pieds avaient laissé leur empreinte sur les chemins, à chaque pas. En m’installant en Ariège, c’est cette nature que je suis venu retrouver, celle qui, quelques mois auparavant, m’avait offert sept semaines d’aventure. »
(p. 11-12)
Depuis la côte basque ~ la randonnée itinérante (p. 28-34)
À travers le Biros ~ résurgence du passé (p. 117-121)
Crète de la Bède ~ la beauté du voyage (p. 162-166)