Pauvre pêcheur :
« Vous voyez, moi, j’ai toujours rêvé de découvrir un tombeau. Non pas pour le piller. Pas du tout. Mais pour l’ivresse de la découverte ! Savoir qu’on foule une terre travaillée il y a deux millénaires, qu’on touche du coton filé, teint et tissé il y a si longtemps, être témoin de ce que mangeaient nos ancêtres à cette époque? C’est un rêve, je vous dis. Un rêve devenu réalité, et qui risque de me coûter cher.
Vous voyez, je pense toujours : “Pourquoi les archéologues ont droit à ça, pourquoi ont-ils droit au frisson de la découverte, et pourquoi pas moi, pauvre pêcheur descendant des Paracas ?” Moi, j’ai jamais eu l’intention de vandaliser, ni d’abîmer, ni de piller. Je voulais juste me retrouver face à face, un jour dans ma vie, avec un peu de mon passé lointain. C’est trop demander, ça ?
Oui, oui, excusez mes propos. Où j’en étais ? Voilà, donc pour tout vous avouer, avec les centaines d’heures d’exploration que j’ai à mon actif, j’ai appris à les repérer, les tombes. Elles sont peut-être souterraines, mais il y a des signes qui trompent pas en surface. Du relief, souvent. Une sorte de monticule ténu. Bon, c’est pas évident, il faut avoir l’œil. À force, j’ai appris à l’avoir, moi. Il faut dire que j’étais pas toujours seul, au début. On se rendait à plusieurs sur la péninsule, avec des copains plus expérimentés. Bien entendu, on n’allait pas sur le Cerro Colorado, parce que c’est surveillé. On est tout de même dans une réserve nationale où a été effectuée l’une des découvertes archéologiques les plus importantes du xxe siècle. Mais on faisait attention, on y allait aux bonnes heures. Plutôt en fin de journée, au coucher du soleil, parce que, de toute façon, on n’avait pas le droit d’être là. Donc il fallait être discrets. Et p’is peu à peu, moi, j’ai décidé d’explorer plus au sud de la péninsule. La côte y fait partie de la réserve sur plusieurs dizaines de kilomètres, mais c’est beaucoup moins contrôlé. Moi, j’avais tout simplement envie de me promener seul dans le désert et pas seulement la nuit : la journée aussi. Je vous fais pas de dessin. C’est comme ça que j’ai repéré le tombeau. L’entrée était là, face à la mer, sans surveillance. Bien sûr, au début, j’en étais pas certain. Et p’is j’ai hésité avant de vérifier. Bien sûr, j’avais peur ! Je me disais que, peut-être, il pouvait y avoir des patrouilles volantes dans le coin. Ou que quelqu’un pouvait très bien m’espionner. Alors, j’ai décidé de ne rien faire et de revenir le soir même. »
Au bonheur des saints (p. 51-53)
Sale mine (p. 145-147)
Extrait court
« Vous voyez, moi, j’ai toujours rêvé de découvrir un tombeau. Non pas pour le piller. Pas du tout. Mais pour l’ivresse de la découverte ! Savoir qu’on foule une terre travaillée il y a deux millénaires, qu’on touche du coton filé, teint et tissé il y a si longtemps, être témoin de ce que mangeaient nos ancêtres à cette époque? C’est un rêve, je vous dis. Un rêve devenu réalité, et qui risque de me coûter cher.
Vous voyez, je pense toujours : “Pourquoi les archéologues ont droit à ça, pourquoi ont-ils droit au frisson de la découverte, et pourquoi pas moi, pauvre pêcheur descendant des Paracas ?” Moi, j’ai jamais eu l’intention de vandaliser, ni d’abîmer, ni de piller. Je voulais juste me retrouver face à face, un jour dans ma vie, avec un peu de mon passé lointain. C’est trop demander, ça ?
Oui, oui, excusez mes propos. Où j’en étais ? Voilà, donc pour tout vous avouer, avec les centaines d’heures d’exploration que j’ai à mon actif, j’ai appris à les repérer, les tombes. Elles sont peut-être souterraines, mais il y a des signes qui trompent pas en surface. Du relief, souvent. Une sorte de monticule ténu. Bon, c’est pas évident, il faut avoir l’œil. À force, j’ai appris à l’avoir, moi. Il faut dire que j’étais pas toujours seul, au début. On se rendait à plusieurs sur la péninsule, avec des copains plus expérimentés. Bien entendu, on n’allait pas sur le Cerro Colorado, parce que c’est surveillé. On est tout de même dans une réserve nationale où a été effectuée l’une des découvertes archéologiques les plus importantes du xxe siècle. Mais on faisait attention, on y allait aux bonnes heures. Plutôt en fin de journée, au coucher du soleil, parce que, de toute façon, on n’avait pas le droit d’être là. Donc il fallait être discrets. Et p’is peu à peu, moi, j’ai décidé d’explorer plus au sud de la péninsule. La côte y fait partie de la réserve sur plusieurs dizaines de kilomètres, mais c’est beaucoup moins contrôlé. Moi, j’avais tout simplement envie de me promener seul dans le désert et pas seulement la nuit : la journée aussi. Je vous fais pas de dessin. C’est comme ça que j’ai repéré le tombeau. L’entrée était là, face à la mer, sans surveillance. Bien sûr, au début, j’en étais pas certain. Et p’is j’ai hésité avant de vérifier. Bien sûr, j’avais peur ! Je me disais que, peut-être, il pouvait y avoir des patrouilles volantes dans le coin. Ou que quelqu’un pouvait très bien m’espionner. Alors, j’ai décidé de ne rien faire et de revenir le soir même. »
(p. 71-73)
Au bonheur des saints (p. 51-53)
Sale mine (p. 145-147)
Extrait court