Prémices :
« Mes excursions ferroviaires ont ainsi longtemps pris l’aspect d’une reconnaissance des images que mes heures de loisir avaient fait naître. La plongée dans les indicateurs d’horaires se révèle un excellent vecteur de l’imagination. Pour le commun des voyageurs, ces pages se limitent à d’austères, voire d’incompréhensibles notes sur la circulation des trains. En revanche, un esprit rêveur saura établir à partir de leur lecture une déambulation presque poétique, au charme infini, mêlant nostalgie, mythe et littérature. J’ai ainsi souvent rêvé sur la consonance romanesque de “La Chapelle-Anthenaise”, nom de village qui aurait pu trouver sa place dans Le Grand Meaulnes ; cette gare a longtemps figuré dans le mythique indicateur Chaix (qui commença à paraître tous les dimanches à partir du 5 août 1849), alors que plus aucun train ne la desservait, si insignifiante que nul n’avait songé à acter sa disparition sur le papier. Le mystère de certaines dessertes entraînait également d’autres songeries : par exemple, sur une ligne, la circulation se limitait à un trajet hebdomadaire dans un sens puis dans l’autre. J’en déduisais que le maintien du trafic avait pour cause la présence d’un internat, et mon esprit partait vagabonder sur les images de cohortes de pensionnaires au visage chiffonné par un réveil matinal, partant dans l’air glacé d’un lundi d’hiver retrouver un lieu hostile et abhorré qu’ils quitteraient le vendredi soir. Enfin,“Le premier train peut être supprimé en cas de difficultés de circulation”, phrase apposée en bas d’une page communiquant les horaires d’une ligne de montagne, convoquait des scènes de tempête de neige et de silhouettes suspendues au-dessus des viaducs pour dégager les voies, pendant que d’autres agitaient des falots dans la nuit pour retrouver les voyageurs égarés. »
Le rapport au temps (p. 25-27)
Un flot d’images (p. 37-40)
Complicité (p. 46-49)
« Mes excursions ferroviaires ont ainsi longtemps pris l’aspect d’une reconnaissance des images que mes heures de loisir avaient fait naître. La plongée dans les indicateurs d’horaires se révèle un excellent vecteur de l’imagination. Pour le commun des voyageurs, ces pages se limitent à d’austères, voire d’incompréhensibles notes sur la circulation des trains. En revanche, un esprit rêveur saura établir à partir de leur lecture une déambulation presque poétique, au charme infini, mêlant nostalgie, mythe et littérature. J’ai ainsi souvent rêvé sur la consonance romanesque de “La Chapelle-Anthenaise”, nom de village qui aurait pu trouver sa place dans Le Grand Meaulnes ; cette gare a longtemps figuré dans le mythique indicateur Chaix (qui commença à paraître tous les dimanches à partir du 5 août 1849), alors que plus aucun train ne la desservait, si insignifiante que nul n’avait songé à acter sa disparition sur le papier. Le mystère de certaines dessertes entraînait également d’autres songeries : par exemple, sur une ligne, la circulation se limitait à un trajet hebdomadaire dans un sens puis dans l’autre. J’en déduisais que le maintien du trafic avait pour cause la présence d’un internat, et mon esprit partait vagabonder sur les images de cohortes de pensionnaires au visage chiffonné par un réveil matinal, partant dans l’air glacé d’un lundi d’hiver retrouver un lieu hostile et abhorré qu’ils quitteraient le vendredi soir. Enfin,“Le premier train peut être supprimé en cas de difficultés de circulation”, phrase apposée en bas d’une page communiquant les horaires d’une ligne de montagne, convoquait des scènes de tempête de neige et de silhouettes suspendues au-dessus des viaducs pour dégager les voies, pendant que d’autres agitaient des falots dans la nuit pour retrouver les voyageurs égarés. »
(p. 15-16)
Le rapport au temps (p. 25-27)
Un flot d’images (p. 37-40)
Complicité (p. 46-49)