Comme une stèle dans mon souvenir :
« Tôt ce matin, je suis allé relever une ligne de fond ennoyée à quelques centaines de mètres, dans une anse habituellement poissonneuse. Au retour, je canote paresseusement en traversant le lac, porté par une eau lisse et limpide. Sur la berge ouverte à la lumière, ma cabane a belle allure. Moitié sur la terre, moitié sur l’eau, elle s’offre et s’intègre à l’espace. Forgée dans les bois les plus nobles, elle fait corps avec le couvert des grands arbres. Dressée sur ses jambes de bois, elle s’élève au-dessus de l’onde, délicate et hospitalière. Quelques coups de rame ont suffi à me ramener à l’essentiel : ma cabane et rien de plus.
Le printemps austral explose de couleurs. Il y a trois ans, je m’installai sur l’île de Chiloé, au large du Chili, dans ce refuge lacustre que la forêt enveloppait de sa verte fourrure. Le premier soir est gravé comme une stèle dans mon souvenir. Assis sur mon seuil, face à l’étendue liquide, j’avais le cœur au bord des lèvres, j’étais comme noué, sans savoir si c’était de stupeur ou d’extase. Je vivais ce frisson de solitude qui traverse l’échine comme l’éclair traverse le bois. Resterait à entrer dans l’épreuve, à laisser venir les jours et le grain de l’expérience. M’adapter demanderait du temps. La tournure des choses dépendrait entièrement de moi. Il me faudrait d’abord sentir, écouter, m’imprégner de la nature, affiner ma perception. Comprendre au juste ce que le vent me souffle, ce que gémissent les arbres lorsqu’ils craquent comme des cordes, ce que chante le clapot du lac quand il se change en voix humaine, ce qu’éclaire la lumière vaporeuse du petit matin. »
Le rôle initiatique de la cabane (p. 23-27)
Le dedans, le dehors et le retour à l’essentiel (p. 29-33)
Dites-moi ce que vous habitez et je vous dirai qui vous êtes ! (p. 61-65)
« Tôt ce matin, je suis allé relever une ligne de fond ennoyée à quelques centaines de mètres, dans une anse habituellement poissonneuse. Au retour, je canote paresseusement en traversant le lac, porté par une eau lisse et limpide. Sur la berge ouverte à la lumière, ma cabane a belle allure. Moitié sur la terre, moitié sur l’eau, elle s’offre et s’intègre à l’espace. Forgée dans les bois les plus nobles, elle fait corps avec le couvert des grands arbres. Dressée sur ses jambes de bois, elle s’élève au-dessus de l’onde, délicate et hospitalière. Quelques coups de rame ont suffi à me ramener à l’essentiel : ma cabane et rien de plus.
Le printemps austral explose de couleurs. Il y a trois ans, je m’installai sur l’île de Chiloé, au large du Chili, dans ce refuge lacustre que la forêt enveloppait de sa verte fourrure. Le premier soir est gravé comme une stèle dans mon souvenir. Assis sur mon seuil, face à l’étendue liquide, j’avais le cœur au bord des lèvres, j’étais comme noué, sans savoir si c’était de stupeur ou d’extase. Je vivais ce frisson de solitude qui traverse l’échine comme l’éclair traverse le bois. Resterait à entrer dans l’épreuve, à laisser venir les jours et le grain de l’expérience. M’adapter demanderait du temps. La tournure des choses dépendrait entièrement de moi. Il me faudrait d’abord sentir, écouter, m’imprégner de la nature, affiner ma perception. Comprendre au juste ce que le vent me souffle, ce que gémissent les arbres lorsqu’ils craquent comme des cordes, ce que chante le clapot du lac quand il se change en voix humaine, ce qu’éclaire la lumière vaporeuse du petit matin. »
(p. 11-12)
Le rôle initiatique de la cabane (p. 23-27)
Le dedans, le dehors et le retour à l’essentiel (p. 29-33)
Dites-moi ce que vous habitez et je vous dirai qui vous êtes ! (p. 61-65)