
Retour à la nature :
« Nous poursuivons notre route sur ce ruban d’asphalte, véritable fil d’Ariane. Les habitations et les installations de ravitaillement pour pèlerins s’espacent jusqu’à disparaître. Quelques vaches trônent encore au milieu de la route. Ne croisant plus que des travailleurs au salaire de misère (50 roupies par jour, soit un peu moins d’un euro), nous montons à travers des plantations d’ananas et de caoutchouc. Nous respirons à pleins poumons les senteurs d’ananas fraîchement coupés et celle, moins agréable, du latex. Enfin, pas à pas, nous entrons dans la jungle – la vraie : celle qui angoisse par ses silences autant que par ses bourdonnements, ses bruissements de feuilles et ses sifflements dans les herbes hautes. Un retour à la nature que nous apprécions, après quinze jours à traverser des villages, avec des habitations toujours à portée de vue et une présence humaine quasi permanente. Sur ce “sentier” inespéré, nous profitons du confort de la percée goudronnée. Elle nous permet de profiter du spectacle sans nous soucier de nos pieds. Les yeux en l’air et les oreilles en alerte, nous nous enfonçons dans une végétation dense, vivante, étonnante : ça jacasse sous un arbre ; ailleurs, ça rigole tandis qu’une autre bête imite le miaulement d’un chat. Un peu plus loin, un oiseau chante une mélodie à six notes. Et quel est donc cet animal dont le cri s’accélère, de façon stridente, à mesure que nous nous rapprochons de lui ?
Nous nous émerveillons devant un oiseau aux plumes orangées, des papillons d’un bleu topaze, ou encore la queue d’un oiseau noir, en forme de filaments qui se terminent par une plume. Les singes et les écureuils, sautant de branche en branche, nous offrent leurs acrobaties de haut vol. Et à chaque virage nous nous attendons à voir sortir un éléphant. Seule une affiche de sensibilisation semble rappeler leur présence ; malheureusement, le braconnage en a considérablement réduit le nombre.
Malgré tout, nous nous demandons ce que nous ferions si nous devions croiser un de ces pachydermes. Nous n’avons rien pour nous défendre face à de telles forces de la nature. Or les éléphants sauvages sont dangereux, en particulier en présence de leurs petits. Ils ne sont pas dressés comme ceux que nous avons pu voir récemment dans un camp, où ils sont éduqués pendant plusieurs mois avant d’être utiles à l’homme pour les tâches agricoles ou les fêtes religieuses. Le long de la route, nous repérons les trous géants qui servent à leur capture plus ou moins légale. Les postes de l’Office des forêts sont là pour nous le rappeler : “Vous ne pouvez pas aller par là. Il y a des animaux sauvages. Des éléphants et même des tigres !” »
Goa (p. 161-162)
Shashi (p. 238-240)
Extrait court
« Nous poursuivons notre route sur ce ruban d’asphalte, véritable fil d’Ariane. Les habitations et les installations de ravitaillement pour pèlerins s’espacent jusqu’à disparaître. Quelques vaches trônent encore au milieu de la route. Ne croisant plus que des travailleurs au salaire de misère (50 roupies par jour, soit un peu moins d’un euro), nous montons à travers des plantations d’ananas et de caoutchouc. Nous respirons à pleins poumons les senteurs d’ananas fraîchement coupés et celle, moins agréable, du latex. Enfin, pas à pas, nous entrons dans la jungle – la vraie : celle qui angoisse par ses silences autant que par ses bourdonnements, ses bruissements de feuilles et ses sifflements dans les herbes hautes. Un retour à la nature que nous apprécions, après quinze jours à traverser des villages, avec des habitations toujours à portée de vue et une présence humaine quasi permanente. Sur ce “sentier” inespéré, nous profitons du confort de la percée goudronnée. Elle nous permet de profiter du spectacle sans nous soucier de nos pieds. Les yeux en l’air et les oreilles en alerte, nous nous enfonçons dans une végétation dense, vivante, étonnante : ça jacasse sous un arbre ; ailleurs, ça rigole tandis qu’une autre bête imite le miaulement d’un chat. Un peu plus loin, un oiseau chante une mélodie à six notes. Et quel est donc cet animal dont le cri s’accélère, de façon stridente, à mesure que nous nous rapprochons de lui ?
Nous nous émerveillons devant un oiseau aux plumes orangées, des papillons d’un bleu topaze, ou encore la queue d’un oiseau noir, en forme de filaments qui se terminent par une plume. Les singes et les écureuils, sautant de branche en branche, nous offrent leurs acrobaties de haut vol. Et à chaque virage nous nous attendons à voir sortir un éléphant. Seule une affiche de sensibilisation semble rappeler leur présence ; malheureusement, le braconnage en a considérablement réduit le nombre.
Malgré tout, nous nous demandons ce que nous ferions si nous devions croiser un de ces pachydermes. Nous n’avons rien pour nous défendre face à de telles forces de la nature. Or les éléphants sauvages sont dangereux, en particulier en présence de leurs petits. Ils ne sont pas dressés comme ceux que nous avons pu voir récemment dans un camp, où ils sont éduqués pendant plusieurs mois avant d’être utiles à l’homme pour les tâches agricoles ou les fêtes religieuses. Le long de la route, nous repérons les trous géants qui servent à leur capture plus ou moins légale. Les postes de l’Office des forêts sont là pour nous le rappeler : “Vous ne pouvez pas aller par là. Il y a des animaux sauvages. Des éléphants et même des tigres !” »
(p. 80-82)
Goa (p. 161-162)
Shashi (p. 238-240)
Extrait court