Collection « Voyage en poche »

  • Par le souffle de Sayat-Nova
  • Yamabushi
  • La Seine en roue libre
  • Jours blancs dans le Hardanger
  • Au nom de Magellan
  • Faussaire du Caire (Le)
  • Ivre de steppes
  • Condor et la Momie (Le)
  • Retour à Kyôto
  • Dolomites
  • Consentement d’Alexandre (Le)
  • Une yourte sinon rien
  • La Loire en roue libre
  • Sous les yourtes de Mongolie
  • Au vent des Kerguelen
  • Centaure de l’Arctique (Le)
  • La nuit commence au cap Horn
  • Bons baisers du Baïkal
  • Nanda Devi
  • Confidences cubaines
  • Pyrénées
  • Seule sur le Transsibérien
  • Dans les bras de la Volga
  • Tempête sur l’Aconcagua
  • Évadé de la mer Blanche (L’)
  • Dans la roue du petit prince
  • Girandulata
  • Aborigènes
  • Amours
  • Grande Traversée des Alpes (La)
  • Par les sentiers de la soie
  • Vers Compostelle
  • Pour tout l’or de la forêt
  • Intime Arabie
  • Voleur de mémoire (Le)
  • Une histoire belge
  • Plus Petit des grands voyages (Le)
  • Souvenez-vous du Gelé
  • Nos amours parisiennes
  • Exploration spirituelle de l’Inde (L’)
  • Ernest Hemingway
  • Nomade du Grand Nord
  • Kaliméra
  • Nostalgie du Mékong
  • Invitation à la sieste (L’)
  • Corse
  • Robert Louis Stevenson
  • Souffleur de bambou (Le)
  • Sagesse de l’herbe
  • Pianiste d’Éthiopie (Le)
  • Exploration de la Sibérie (L’)
  • Une Parisienne dans l’Himalaya
  • Voyage en Mongolie et au Tibet
  • Madère
  • Ambiance Kinshasa
  • Passage du Mékong au Tonkin
  • Sept sultans et un rajah
  • Ermitages d’un jour
  • Unghalak
  • Pèlerin d’Occident
  • Chaos khmer
  • Un parfum de mousson
  • Qat, honneur et volupté
  • Exploration de l’Australie (L’)
  • Pèlerin d’Orient
  • Cette petite île s’appelle Mozambique
  • Des déserts aux prisons d’Orient
  • Dans l’ombre de Gengis Khan
  • Opéra alpin (L’)
  • Révélation dans la taïga
  • Voyage à la mer polaire
Couverture
Quartiers d’hiver :

« Le soleil nous ayant définitivement fait ses adieux, il s’agissait de pousser ferme nos préparatifs d’hivernage. En dehors de notre enceinte de floebergs, le pack continuait ses promenades, indice certain de l’état fragmentaire des glaces dans le détroit de Robeson. Il fallait donc, à notre inexprimable contrariété, renoncer à toute communication avec le Discovery avant le printemps 1876. Le lieutenant Rawson et sa compagnie avaient cru ne quitter leur bord que pour quelques jours et ne s’étaient point munis d’effets d’hiver. Mais ce que je ne trouvai pas pour eux dans les réserves du magasin fut généreusement fourni par les camarades, et ils passèrent la saison froide aussi confortablement que tout un chacun.
Tout allait bien sur l’Alert, à l’exception de nos malheureux gelés. Si nos hommes avaient été plus avisés en choses arctiques, ils ne se seraient pas ainsi laissé prendre, mais les maximes et les conseils prémonitoires seront toujours inutiles, et l’expérience seule enseigne au voyageur polaire que ses pieds peuvent le porter longtemps après que la circulation sanguine y a complètement cessé. De même, le visage est attaqué sans que la victime s’en aperçoive, jusqu’à ce qu’un obligeant voisin la prévienne que ses oreilles, ses joues ou son nez sont devenus d’un blanc livide : il n’y a rien à craindre tant que se prolonge la sensation aiguë du froid. Notre cas le plus grave est celui d’un matelot qui avait négligé, le soir, d’enlever ses chaussures, sous le prétexte qu’elles étaient trop gelées ; il lui semblait qu’il vaudrait mieux les sécher la nuit sous son sac à dormir. Les chiens nous donnent beaucoup de souci. Sur les trente primitivement embarqués à bord, quinze ont succombé au fléau, se sont enfuis ou ont dû être abattus. Et cependant nous avions choisi ces animaux avec le plus grand soin, dans les districts du Groenland septentrional que l’on supposait encore exempts de l’affreuse maladie dont les établissements danois ont tous plus ou moins souffert. Des chiens, en apparence très bien portants, sont tout d’un coup atteints de crises assez semblables à l’épilepsie. Les spasmes de ces pauvres bêtes font mal à voir. Dans l’intervalle des accès, elles rôdent çà et là, comme privées de connaissance, l’écume à la gueule, ou bien mordent et attaquent leurs compagnons d’attelage et toute personne se trouvant à portée. Ils se jettent à la mer, ils vont errant sur la glace mince, toutes choses auxquelles dans l’état de santé ils ne se risquent jamais : le chien du Groenland a une horreur invincible de l’eau. J’en ai vu un, couché sur une pente de neige qui dominait l’océan : sentant d’instinct que la crise allait arriver, le malheureux faisait des efforts inouïs pour remonter le talus, hurlant à fendre l’âme ; mais ses jambes lui refusaient tout service : il roula dans l’abîme et aurait été noyé si quelqu’un des nôtres n’avait couru à son secours. Les docteurs Colan et Belgrave Ninnis, médecins des deux navires, apportèrent l’attention la plus scrupuleuse au traitement et réussirent à sauver quelques-uns de ces animaux qui, par la suite, nous furent encore très utiles. Le docteur Ninnis a publié son rapport officiel sur cette étrange et mystérieuse affection ; nous regrettons vivement que ce travail ne fournisse aucune donnée nouvelle. Dans plusieurs de ses phases, la maladie a beaucoup de ressemblance avec la rage, mais on ne connaît pas au Groenland un seul exemple établissant qu’un homme mordu ait été atteint d’hydrophobie. D’ailleurs, les guérisons que nous avons pu constater contredisent toute hypothèse de la présence du véritable virus rabique.
Après de nombreuses conférences avec le docteur Colan sur le régime à suivre pendant l’hiver, on augmente, aux dépens des salaisons, les rations de viande en boîte. Nous avons du bœuf musqué pour un mois. On fait du pain pour trois jours ; le quatrième, nous mangeons du biscuit. Comme il serait difficile aux explorateurs du printemps d’emporter avec eux des conserves de fruits, nos desserts de l’hiver vont être améliorés à la satisfaction de chacun.
Je fais construire sur le floe des huttes de neige pour y placer nos quartiers de bœuf salé. Aussi longtemps que la température s’y maintient au-dessus de -16 ou -17°, ils ne gèlent pas et continuent à s’égoutter, se débarrassant ainsi d’une notable portion de sel ; la viande a plus de saveur quand on ne la détrempe pas avant de la cuire. Pendant son hivernage de 1851 à 1852 à la terre du North-Somerset, M. Kennedy ne réussit pas aussi bien : “D’après le conseil de mes officiers, dit-il, je fis enfouir dans la neige des planches de bœuf salé pour voir si elles résisteraient au gel et perdraient leur excédent de saumure, mais je ne me trouvai pas merveilleusement du procédé.” C’est qu’il n’avait pas, comme nous, pris la précaution de les mettre dans un garde-manger de neige pour les tenir à l’abri d’une température trop rigoureuse.
Les remparts que nous élevons autour du navire avancent avec une lenteur exaspérante. Les matériaux à notre portée s’épuisent bien vite, et il faut employer les traîneaux pour en prendre au rivage où nous construisons aussi, en vue des études astronomiques et magnétiques, deux superbes observatoires que les hommes baptisent spontanément des noms de Kew et de Greenwich. Les architectes ont enfin la bonne fortune de mettre la main sur des bancs de neige très dure, entassée par les rafales de la mi-septembre dernière, et que les névés roulés avaient jusqu’ici dérobés à nos investigations. L’ouvrage marche vite et bien, mais, comme on écarte rigoureusement les blocs de qualité inférieure, tous ces rebuts causent, aux abords de nos divers chantiers, un désordre qui ne nous fait guère honneur : la nuit approche et il faut pourvoir au plus pressé. Quelques officiers se donnent le luxe de petits pavillons de neige où ils placent le surplus des richesses contenues dans leurs étroites cabines. »
(p. 197-201)

Markham vers le pôle (p. 359-362)
Ultimes explorations (p. 580-583)
Extrait court
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