Le joug colonial – L’impérialisme britannique :
« Histoire des neuf royaumes
Au XVIIIe siècle, sur le territoire de Negeri Sembilan, le conseil des chefs de clan fit venir un outsider de l’ethnie minangkabau (le peuple du buffle – kabau – victorieux – minang –, dont la langue fait partie de la famille austronésienne comme le malais) sur l’île de Sumatra pour régner sur les neuf royaumes, dans le but d’éviter les conflits territoriaux et de succession. À cette période, deux systèmes judiciaires cohabitaient chez les Minangkabau : adat temenggung, coutume patriarcale qui considère les affaires politiques et religieuses comme étant de la responsabilité des hommes, et adat perpatih, coutume matriarcale, qui régule le droit terrien et de propriété par transmission de mère en fille. Seule cette dernière sera introduite.
Dans ce système, les femmes représentant chaque lignée ancestrale élisent parmi elles un chef de clan, lesquels sont tenus de légiférer, le tout sous l’autorité du Yang-di-Pertuan Besar. Ce système sera formalisé pour la première fois en 1773, comme l’attestent les archives hollandaises, soit trois ans avant la déclaration d’indépendance qui faisait des treize colonies américaines un ensemble fédéré d’États indépendants constituant une nation nouvelle : les États-Unis d’Amérique. Autrement dit, le territoire de Negeri Sembilan a construit une forme de proto-confédéralisme avant les USA !
Au sein de l’aristocratie malaise, le rang est synonyme de pouvoir, il s’avère étroitement lié à la lignée royale. À l’époque de la conquête politique britannique, le pouvoir se trouve concentré entre les mains de quelques sultans, parfois nommés “raja”. Chacun d’entre eux règne alors sur un territoire équivalent approximativement aux futurs États malais. Les sultans ou raja possèdent la terre. Des exceptions se présentent dans quelques îles où des Orang Laut peuvent prétendre opérer comme autorité indépendante. L’autorité royale peut également être questionnée dans certains districts de l’île de Bornéo où la terre est traditionnellement transmise par voie d’héritage (tulin). Le pouvoir suprême et les richesses demeurent cependant essentiellement entre les mains des sultans. La structuration de la cour malaise est directement héritée de celle conçue primordialement par les premiers souverains du sultanat de Melaka.
Parmi les ministres qui gèrent les affaires quotidiennes du royaume, quatre figures sont régulièrement citées comme les plus importantes dans le Sejarah Melayu. Il s’agit du Bendahara, du Penghulu Bendahari, du Temenggung et du Laksamana. Le Bendahara, au rang le plus élevé parmi les quatre fonctions précitées, fait alors office de Grand Vizir ou Premier ministre ; il est en outre chargé de régler les conflits entre marchands et parmi les sujets malais du sultan. Il est assisté par son subordonné immédiat, le Penghulu Bendahari, dont les charges essentielles consistent à superviser les Syahbandar (ou Shahbandar, chefs de port) et le personnel domestique du sultan ; il occupe aussi la fonction de trésorier royal. Le Temenggung fait à la fois figure de ministre de la Justice et de chef de la police. Étant responsable de l’exercice de la justice et du maintien de l’ordre, il travaille en étroite collaboration avec le Laksamana (commandeur militaire), responsable des forces armées sur terre et sur mer. Le système du pouvoir n’est pas autoritaire dans la mesure où des formes de consultation sont systématisées, comme le rappelle la mise en place du “Conseil des nobles”, auquel le sultan fait appel avant la prise de nouvelles mesures.
Entre la cour royale et les paysans s’intercale au quotidien un seul échelon intermédiaire : la figure du Penghulu. Le Penghulu est en charge d’un mukim, un district administratif consistant en une localité principale et un certain nombre de villages ou de hameaux. Les Penghulu, qui sont inféodés aux sultans, ont souvent pour charge la collecte des taxes pour Leurs Majestés, ainsi que l’administration de la justice et le maintien de l’ordre au sein de leur district. Les atteintes à l’ordre public sont le fait des anak raja (fils du roi), car la coutume de la polygamie engendre une progéniture royale importante qui donne lieu à des disputes de succession, tous ne pouvant pas être absorbés au sein de la cour royale. »
Des origines aux grands royaumes – De la ville au sultanat de Melaka (p. 53-55)
La clé de l’alimentation – Une mosaïque culinaire (p. 219-221)
Extrait court
« Histoire des neuf royaumes
Au XVIIIe siècle, sur le territoire de Negeri Sembilan, le conseil des chefs de clan fit venir un outsider de l’ethnie minangkabau (le peuple du buffle – kabau – victorieux – minang –, dont la langue fait partie de la famille austronésienne comme le malais) sur l’île de Sumatra pour régner sur les neuf royaumes, dans le but d’éviter les conflits territoriaux et de succession. À cette période, deux systèmes judiciaires cohabitaient chez les Minangkabau : adat temenggung, coutume patriarcale qui considère les affaires politiques et religieuses comme étant de la responsabilité des hommes, et adat perpatih, coutume matriarcale, qui régule le droit terrien et de propriété par transmission de mère en fille. Seule cette dernière sera introduite.
Dans ce système, les femmes représentant chaque lignée ancestrale élisent parmi elles un chef de clan, lesquels sont tenus de légiférer, le tout sous l’autorité du Yang-di-Pertuan Besar. Ce système sera formalisé pour la première fois en 1773, comme l’attestent les archives hollandaises, soit trois ans avant la déclaration d’indépendance qui faisait des treize colonies américaines un ensemble fédéré d’États indépendants constituant une nation nouvelle : les États-Unis d’Amérique. Autrement dit, le territoire de Negeri Sembilan a construit une forme de proto-confédéralisme avant les USA !
Au sein de l’aristocratie malaise, le rang est synonyme de pouvoir, il s’avère étroitement lié à la lignée royale. À l’époque de la conquête politique britannique, le pouvoir se trouve concentré entre les mains de quelques sultans, parfois nommés “raja”. Chacun d’entre eux règne alors sur un territoire équivalent approximativement aux futurs États malais. Les sultans ou raja possèdent la terre. Des exceptions se présentent dans quelques îles où des Orang Laut peuvent prétendre opérer comme autorité indépendante. L’autorité royale peut également être questionnée dans certains districts de l’île de Bornéo où la terre est traditionnellement transmise par voie d’héritage (tulin). Le pouvoir suprême et les richesses demeurent cependant essentiellement entre les mains des sultans. La structuration de la cour malaise est directement héritée de celle conçue primordialement par les premiers souverains du sultanat de Melaka.
Parmi les ministres qui gèrent les affaires quotidiennes du royaume, quatre figures sont régulièrement citées comme les plus importantes dans le Sejarah Melayu. Il s’agit du Bendahara, du Penghulu Bendahari, du Temenggung et du Laksamana. Le Bendahara, au rang le plus élevé parmi les quatre fonctions précitées, fait alors office de Grand Vizir ou Premier ministre ; il est en outre chargé de régler les conflits entre marchands et parmi les sujets malais du sultan. Il est assisté par son subordonné immédiat, le Penghulu Bendahari, dont les charges essentielles consistent à superviser les Syahbandar (ou Shahbandar, chefs de port) et le personnel domestique du sultan ; il occupe aussi la fonction de trésorier royal. Le Temenggung fait à la fois figure de ministre de la Justice et de chef de la police. Étant responsable de l’exercice de la justice et du maintien de l’ordre, il travaille en étroite collaboration avec le Laksamana (commandeur militaire), responsable des forces armées sur terre et sur mer. Le système du pouvoir n’est pas autoritaire dans la mesure où des formes de consultation sont systématisées, comme le rappelle la mise en place du “Conseil des nobles”, auquel le sultan fait appel avant la prise de nouvelles mesures.
Entre la cour royale et les paysans s’intercale au quotidien un seul échelon intermédiaire : la figure du Penghulu. Le Penghulu est en charge d’un mukim, un district administratif consistant en une localité principale et un certain nombre de villages ou de hameaux. Les Penghulu, qui sont inféodés aux sultans, ont souvent pour charge la collecte des taxes pour Leurs Majestés, ainsi que l’administration de la justice et le maintien de l’ordre au sein de leur district. Les atteintes à l’ordre public sont le fait des anak raja (fils du roi), car la coutume de la polygamie engendre une progéniture royale importante qui donne lieu à des disputes de succession, tous ne pouvant pas être absorbés au sein de la cour royale. »
(p. 90-94)
Des origines aux grands royaumes – De la ville au sultanat de Melaka (p. 53-55)
La clé de l’alimentation – Une mosaïque culinaire (p. 219-221)
Extrait court