
Rio de San Julián (Patagonie) :
« Les rafales de vent hurlaient dans le gréement et giflaient les visages d’embruns piquants. Ça se bousculait sur le gaillard d’avant et les officiers tentèrent d’y mettre bon ordre. Ils firent d’abord descendre quelques marins, hommes aguerris à se jucher sur des espars de bois et à se balancer à un cordage. Après moult acrobaties, ceux-ci rejoignirent le sable, visiblement soulagés. Une fois la technique éprouvée, d’autres s’élancèrent sur le beaupré. Ainsi, Yann mit lui aussi pied à terre.
La moitié des hommes s’étaient déjà mis en sûreté immédiate quand fut donné l’ordre à ceux qui restaient sur la nef de sauver le plus de vivres et de matériel possible. Richard, comme charpentier du bord, prit sur lui quelques-uns de ses outils et le maître le laissa descendre du bateau.
Une vague plus grosse que les autres asséna un véritable coup de boutoir à la coque déjà endommagée, qui bascula sous le choc. Le bois craqua et l’eau s’engouffra dans la cale. Dès lors, ce fut chacun pour soi. La plupart des hommes encore à bord se précipitèrent vers le beaupré, d’autres se mirent à l’eau, parmi lesquels Barthélemy. Agrippé au bordé, harcelé par les vagues qui s’y cognaient, recrachant sans cesse de l’eau de mer, il hala peu à peu son corps massif vers l’avant. Non sans peine, il parvint à rejoindre le sable.
Tous les membres de l’équipage, soit une bonne trentaine d’hommes, étaient désormais réunis sur la plage. Tous, sauf un, noyé dans le sauve-qui-peut final. C’était Juan Negro, l’esclave du capitaine, le seul Noir du bord.
Comme le temps restait sec, Barthélemy et d’autres se déshabillèrent complètement et mirent à sécher tant bien que mal leurs vêtements imprégnés d’eau salée. En attendant, on leur prêta quelques hardes. Le capitaine ordonna de faire un rapide inventaire de ce qui avait pu être sauvé. Côté nourriture, on n’avait ramené guère plus qu’un peu de biscuit. On avait aussi récupéré un tonnelet d’eau, un autre de vin, de la toile et des hameçons. Le capitaine et les supplétifs avaient débarqué avec leurs armes. Et c’était à peu près tout.
La tempête ne faiblissait pas. Le bateau se disloquait peu à peu et l’on put recueillir des planches, des lambeaux de voile ainsi que quelques cordages et débris amenés par les vagues. Un groupe installa un camp de fortune dans un recoin de la falaise. Fort heureusement, on avait pu sauver du désastre le nécessaire à faire du feu. L’un des hommes frappa la pierre à feu avec le briquet en acier. Un attroupement se forma car on craignait que l’amadou n’ait pris l’humidité, mais avec les étincelles produites on put en faire de la braise, qui permit d’enflammer l’allumette enduite de soufre. L’équipage rassuré, on envoya les mousses chercher de quoi manger parmi les rochers. »
Le Croisic (Bretagne) (p. 54-56)
Sanlúcar de Barrameda (p. 221-223)
Extrait court
« Les rafales de vent hurlaient dans le gréement et giflaient les visages d’embruns piquants. Ça se bousculait sur le gaillard d’avant et les officiers tentèrent d’y mettre bon ordre. Ils firent d’abord descendre quelques marins, hommes aguerris à se jucher sur des espars de bois et à se balancer à un cordage. Après moult acrobaties, ceux-ci rejoignirent le sable, visiblement soulagés. Une fois la technique éprouvée, d’autres s’élancèrent sur le beaupré. Ainsi, Yann mit lui aussi pied à terre.
La moitié des hommes s’étaient déjà mis en sûreté immédiate quand fut donné l’ordre à ceux qui restaient sur la nef de sauver le plus de vivres et de matériel possible. Richard, comme charpentier du bord, prit sur lui quelques-uns de ses outils et le maître le laissa descendre du bateau.
Une vague plus grosse que les autres asséna un véritable coup de boutoir à la coque déjà endommagée, qui bascula sous le choc. Le bois craqua et l’eau s’engouffra dans la cale. Dès lors, ce fut chacun pour soi. La plupart des hommes encore à bord se précipitèrent vers le beaupré, d’autres se mirent à l’eau, parmi lesquels Barthélemy. Agrippé au bordé, harcelé par les vagues qui s’y cognaient, recrachant sans cesse de l’eau de mer, il hala peu à peu son corps massif vers l’avant. Non sans peine, il parvint à rejoindre le sable.
Tous les membres de l’équipage, soit une bonne trentaine d’hommes, étaient désormais réunis sur la plage. Tous, sauf un, noyé dans le sauve-qui-peut final. C’était Juan Negro, l’esclave du capitaine, le seul Noir du bord.
Comme le temps restait sec, Barthélemy et d’autres se déshabillèrent complètement et mirent à sécher tant bien que mal leurs vêtements imprégnés d’eau salée. En attendant, on leur prêta quelques hardes. Le capitaine ordonna de faire un rapide inventaire de ce qui avait pu être sauvé. Côté nourriture, on n’avait ramené guère plus qu’un peu de biscuit. On avait aussi récupéré un tonnelet d’eau, un autre de vin, de la toile et des hameçons. Le capitaine et les supplétifs avaient débarqué avec leurs armes. Et c’était à peu près tout.
La tempête ne faiblissait pas. Le bateau se disloquait peu à peu et l’on put recueillir des planches, des lambeaux de voile ainsi que quelques cordages et débris amenés par les vagues. Un groupe installa un camp de fortune dans un recoin de la falaise. Fort heureusement, on avait pu sauver du désastre le nécessaire à faire du feu. L’un des hommes frappa la pierre à feu avec le briquet en acier. Un attroupement se forma car on craignait que l’amadou n’ait pris l’humidité, mais avec les étincelles produites on put en faire de la braise, qui permit d’enflammer l’allumette enduite de soufre. L’équipage rassuré, on envoya les mousses chercher de quoi manger parmi les rochers. »
(p. 351-353)
Le Croisic (Bretagne) (p. 54-56)
Sanlúcar de Barrameda (p. 221-223)
Extrait court