La chute de lady Alethea :
« Tout à coup sa physionomie se transforma.
— J’ai une offre à vous faire, dit-il avec une gaieté aussi soudaine qu’inattendue.
Une proposition de George étant toujours suspecte, je fus immédiatement sur mes gardes.
— Vous savez qui s’est enrichi le plus à chaque ruée vers l’or, que ce soit en Californie ou ailleurs ?
Avant de répondre, je pris le temps de réfléchir quelques secondes, en avalant une gorgée de thé.
— Ceux qui rencontraient les bons filons en creusant, je suppose.
— Pas du tout. La plupart du temps, ceux qui creusent ne trouvent jamais rien. Ceux qui ont fait fortune sont ceux qui ont vendu des pelles et des pioches aux chercheurs d’or.
Méfiant, j’essayai de comprendre où il voulait en venir.
— Vous me proposez d’en vendre aux archéologues ?
— Presque !? Vous comprenez, ici c’est un peu la même chose : c’est la ruée sur les œuvres archéologiques. L’écrasante majorité de ceux qui retournent des tonnes de sable et de roches le fait en vain. Par contre dès que quelqu’un découvre un site antique, les œuvres se mettent à pulluler, qu’elles soient authentiques ou non.
Curieusement, ces derniers mots me rassurèrent : après un détour singulier, le monde pragmatique de George réapparaissait déjà.
— Prenez l’exemple de Carter, monsieur Stapleton : il est en train de faire transporter plus de 3 000 objets depuis la tombe de Toutânkhamon jusqu’au Caire, 3 000 objets, vous imaginez ? Et comment il va s’y prendre à votre avis ?
— Il va utiliser des barges, pour descendre le Nil?
— Ça, ce n’est pas trop difficile. Mais comment il va faire pour protéger ses œuvres d’art ? Comment elles vont voyager sans le moindre risque ?
George prit alors un petit pain brioché sur la table et il commença à l’envelopper dans sa serviette de table avec le plus grand soin.
— Il va faire emballer chaque pièce ?
— Exactement. Et c’est vous qui allez fournir les matières premières pour remplir toutes les caisses, et pas seulement celles de Carter. Le marché est énorme. Vous n’avez pas idée du nombre d’objets d’art qui arrivent détériorés ou mutilés dans les musées ou chez les collectionneurs. Et je ne parle pas des bras cassés de la Vénus de Milo, croyez-moi ! Tout ce qui est fragile aura besoin de vos services, tout ce qui doit être transporté sur le Nil ou exporté d’Égypte. J’ai les capitaux, et vous avez l’expérience. Vous allez diriger une entreprise d’emballage et vous allez vous charger de l’acheminement des marchandises précieuses. Après tout, vous connaissez déjà les bateaux, et la douane?
L’audace de George me sidéra. Il voulait en quelque sorte me faire rejouer son coup de maître avec la statue du visage de Sekhmet. Mais cette fois, il s’agissait d’une entreprise à grande échelle ! Je coupai court à ses manigances :
— Vous ne croyez tout de même pas que je vais devenir le complice de tous vos trafics !
Le visage de George s’éclaira aussitôt de son sourire désarmant, celui du gamin fier de ses facéties. »
Le narrateur entre en lice (p. 105-107)
George charme le roi fantasque (p. 204-206)
Extrait court
« Tout à coup sa physionomie se transforma.
— J’ai une offre à vous faire, dit-il avec une gaieté aussi soudaine qu’inattendue.
Une proposition de George étant toujours suspecte, je fus immédiatement sur mes gardes.
— Vous savez qui s’est enrichi le plus à chaque ruée vers l’or, que ce soit en Californie ou ailleurs ?
Avant de répondre, je pris le temps de réfléchir quelques secondes, en avalant une gorgée de thé.
— Ceux qui rencontraient les bons filons en creusant, je suppose.
— Pas du tout. La plupart du temps, ceux qui creusent ne trouvent jamais rien. Ceux qui ont fait fortune sont ceux qui ont vendu des pelles et des pioches aux chercheurs d’or.
Méfiant, j’essayai de comprendre où il voulait en venir.
— Vous me proposez d’en vendre aux archéologues ?
— Presque !? Vous comprenez, ici c’est un peu la même chose : c’est la ruée sur les œuvres archéologiques. L’écrasante majorité de ceux qui retournent des tonnes de sable et de roches le fait en vain. Par contre dès que quelqu’un découvre un site antique, les œuvres se mettent à pulluler, qu’elles soient authentiques ou non.
Curieusement, ces derniers mots me rassurèrent : après un détour singulier, le monde pragmatique de George réapparaissait déjà.
— Prenez l’exemple de Carter, monsieur Stapleton : il est en train de faire transporter plus de 3 000 objets depuis la tombe de Toutânkhamon jusqu’au Caire, 3 000 objets, vous imaginez ? Et comment il va s’y prendre à votre avis ?
— Il va utiliser des barges, pour descendre le Nil?
— Ça, ce n’est pas trop difficile. Mais comment il va faire pour protéger ses œuvres d’art ? Comment elles vont voyager sans le moindre risque ?
George prit alors un petit pain brioché sur la table et il commença à l’envelopper dans sa serviette de table avec le plus grand soin.
— Il va faire emballer chaque pièce ?
— Exactement. Et c’est vous qui allez fournir les matières premières pour remplir toutes les caisses, et pas seulement celles de Carter. Le marché est énorme. Vous n’avez pas idée du nombre d’objets d’art qui arrivent détériorés ou mutilés dans les musées ou chez les collectionneurs. Et je ne parle pas des bras cassés de la Vénus de Milo, croyez-moi ! Tout ce qui est fragile aura besoin de vos services, tout ce qui doit être transporté sur le Nil ou exporté d’Égypte. J’ai les capitaux, et vous avez l’expérience. Vous allez diriger une entreprise d’emballage et vous allez vous charger de l’acheminement des marchandises précieuses. Après tout, vous connaissez déjà les bateaux, et la douane?
L’audace de George me sidéra. Il voulait en quelque sorte me faire rejouer son coup de maître avec la statue du visage de Sekhmet. Mais cette fois, il s’agissait d’une entreprise à grande échelle ! Je coupai court à ses manigances :
— Vous ne croyez tout de même pas que je vais devenir le complice de tous vos trafics !
Le visage de George s’éclaira aussitôt de son sourire désarmant, celui du gamin fier de ses facéties. »
(p. 164-166)
Le narrateur entre en lice (p. 105-107)
George charme le roi fantasque (p. 204-206)
Extrait court