Le grand départ :
« Pendant que nous ramons, un ours noir apparaît sur la plage, droit devant. C’est étonnant car, généralement, les ours sortent au contraire quand nous quittons la terre pour rejoindre le bord. Celui-ci ne nous a peut-être pas vus. Nous sommes sous le vent et maintenons notre allure comme si de rien n’était. Il est là, dans les feuillages à l’orée de la forêt, probablement à la recherche de quelques baies précoces. Il ne se soucie absolument pas de notre présence, tout occupé qu’il est à explorer son bosquet. Quelque chose en hauteur attire son attention, aussi se dresse-t-il en équilibre sur ses pattes arrière et se sert-il de celles de devant comme de mains pour fouiller les branchages. Nous jugeons qu’il vaut mieux approcher franchement de face pour ne pas risquer de le surprendre si toutefois il ne nous a pas déjà repérés. Nous évoluons au ralenti sans le quitter des yeux ni jamais le fixer directement pour ne pas le provoquer. Il est à 25 mètres environ.
Nous sommes hors du dinghy, les pieds dans l’eau, quand notre plantigrade vient droit sur nous. Il nous regarde mais la nonchalance et la lenteur de son pas indiquent qu’il n’a pas d’intention agressive. Nous ne bougeons pas. Il s’arrête au bout d’une dizaine de mètres pour flairer une grosse touffe d’herbe. En l’observant, j’oscille en permanence entre attendrissement pour le nounours si agréable à regarder, respect vis-à-vis du seigneur de la forêt et vigilance car nous avons affaire à un animal sauvage redoutable.
Nous reprenons notre activité, en essayant de garder un air dégagé. Au moment où nous posons le canot sur les galets, il tourne les talons et reprend le chemin de la forêt tout doucement, sans même se retourner. Pardonne-nous, ours, de t’avoir dérangé ! Nous ne sommes que des passants. Nous te remercions pour ton hospitalité. Nous avons besoin de marcher un peu, après quoi, tu pourras recouvrer l’intégralité de ton domaine.
Nous passons le reste de la journée tout excités par notre rencontre et nous avouons mutuellement ne pas en avoir mené large jusqu’à ce qu’il rebrousse chemin. Les Alaskans m’ont toujours recommandé de ne jamais m’aventurer dans leur pays sans être armé. Pour ma part, je n’entretiens pas spécialement de bons rapports avec les armes à feu ; quant aux clochettes dont certains touristes, les Japonais surtout, s’équipent pour signaler leur présence, je les refuse car je tiens à conserver la possibilité d’observer la faune sans la déranger. Marcher dans une forêt désertée ne m’intéresse pas. »
En route pour l’océan glacial (p. 142-145)
Course dans les détroits (p. 241-243)
Extrait court
« Pendant que nous ramons, un ours noir apparaît sur la plage, droit devant. C’est étonnant car, généralement, les ours sortent au contraire quand nous quittons la terre pour rejoindre le bord. Celui-ci ne nous a peut-être pas vus. Nous sommes sous le vent et maintenons notre allure comme si de rien n’était. Il est là, dans les feuillages à l’orée de la forêt, probablement à la recherche de quelques baies précoces. Il ne se soucie absolument pas de notre présence, tout occupé qu’il est à explorer son bosquet. Quelque chose en hauteur attire son attention, aussi se dresse-t-il en équilibre sur ses pattes arrière et se sert-il de celles de devant comme de mains pour fouiller les branchages. Nous jugeons qu’il vaut mieux approcher franchement de face pour ne pas risquer de le surprendre si toutefois il ne nous a pas déjà repérés. Nous évoluons au ralenti sans le quitter des yeux ni jamais le fixer directement pour ne pas le provoquer. Il est à 25 mètres environ.
Nous sommes hors du dinghy, les pieds dans l’eau, quand notre plantigrade vient droit sur nous. Il nous regarde mais la nonchalance et la lenteur de son pas indiquent qu’il n’a pas d’intention agressive. Nous ne bougeons pas. Il s’arrête au bout d’une dizaine de mètres pour flairer une grosse touffe d’herbe. En l’observant, j’oscille en permanence entre attendrissement pour le nounours si agréable à regarder, respect vis-à-vis du seigneur de la forêt et vigilance car nous avons affaire à un animal sauvage redoutable.
Nous reprenons notre activité, en essayant de garder un air dégagé. Au moment où nous posons le canot sur les galets, il tourne les talons et reprend le chemin de la forêt tout doucement, sans même se retourner. Pardonne-nous, ours, de t’avoir dérangé ! Nous ne sommes que des passants. Nous te remercions pour ton hospitalité. Nous avons besoin de marcher un peu, après quoi, tu pourras recouvrer l’intégralité de ton domaine.
Nous passons le reste de la journée tout excités par notre rencontre et nous avouons mutuellement ne pas en avoir mené large jusqu’à ce qu’il rebrousse chemin. Les Alaskans m’ont toujours recommandé de ne jamais m’aventurer dans leur pays sans être armé. Pour ma part, je n’entretiens pas spécialement de bons rapports avec les armes à feu ; quant aux clochettes dont certains touristes, les Japonais surtout, s’équipent pour signaler leur présence, je les refuse car je tiens à conserver la possibilité d’observer la faune sans la déranger. Marcher dans une forêt désertée ne m’intéresse pas. »
(p. 62-63)
En route pour l’océan glacial (p. 142-145)
Course dans les détroits (p. 241-243)
Extrait court