
Ma vie à l’écran :
« Un matin, alors qu’il était en France avec les enfants, j’écoutais des chansons françaises : je fus chavirée par Avec le temps, de Léo Ferré. Je pensai immédiatement à Patrice. De tous les hommes que j’ai aimés, il est mon meilleur choix. La passion est encore là, dans nos amours ; la constance est là, dans notre vie quotidienne. J’ai besoin de lui pour vivre. C’est lui qui me rend malheureuse lorsqu’il ne me comprend pas ou quand j’imagine qu’il en aime une autre ; c’est surtout lui qui m’émeut en me disant “je t’aime”. Il m’est devenu indispensable, et je me sens incomplète sans lui. Je sais que la vie est compliquée à mes côtés. Mais, avec tous les hauts et les bas que nous avons traversés, je suis heureuse de partager ses jours et ses nuits. Et, avec le temps, je sais que tout se renforce entre nous, contrairement à ce que chante Léo Ferré !
Ma famille à Malchin n’aurait jamais imaginé ça. Pas plus qu’un jour je jouerais mon propre rôle dans un film. Pourtant, ça s’est fait, et aux côtés d’une grande actrice francophone, Cécile de France. Dans Un monde plus grand, elle incarne mon amie Corine Sombrun, que j’avais accompagnée plusieurs fois en tant que guide et interprète. Moi, la montagnarde de l’Uvs, je découvris donc l’univers du cinéma. En plus de jouer mon rôle devant les caméras de Fabienne Berthaud, j’assurai la logistique et l’intendance du tournage : une sacrée organisation que d’accueillir soixante-dix personnes durant quatre semaines dans la taïga, loin de toute infrastructure ! Il fallait monter un camp d’une trentaine de yourtes. Et trente yourtes, ça ne se trouve pas en un jour? Bien avant le feu vert de la production, je me souviens donc d’avoir pris un risque énorme :
“Il nous reste très peu de temps avant le tournage. Puis-je lancer la fabrication des yourtes et des meubles ? demandai-je à l’une des productrices.
— Non, Naraa, ça n’est pas sûr qu’on puisse tourner cette année. On ne peut pas se permettre de dépenser le moindre euro tant que notre budget n’est pas validé.
— D’accord, j’attendrai”, mentis-je.
Je raccrochai et, sans réfléchir une minute de plus, j’appelai mon artisan pour annoncer la nouvelle : “Démarrez la fabrication immédiatement ! Que le film se fasse ou pas, je vous paierai tout.”
C’était de la folie, mais cette initiative me permit de recevoir l’équipe du film dès l’annonce soudaine du tournage. Avec le recul, je m’aperçois que, dans les moments cruciaux de ma vie, j’ai toujours agi instinctivement, sans penser aux conséquences. J’aime ces moments tendus où l’indécision a des effets plus néfastes que l’action immédiate. Je m’y sens soutenue par mon père et Chovka ! On me dit souvent que je suis comme une tornade dans un jeu de quilles, mais c’est alors que je perçois la présence des êtres chers disparus. »
Le commissaire de la propreté (p. 67-68)
Les mois d’égarement (p. 196-197)
Extrait court
« Un matin, alors qu’il était en France avec les enfants, j’écoutais des chansons françaises : je fus chavirée par Avec le temps, de Léo Ferré. Je pensai immédiatement à Patrice. De tous les hommes que j’ai aimés, il est mon meilleur choix. La passion est encore là, dans nos amours ; la constance est là, dans notre vie quotidienne. J’ai besoin de lui pour vivre. C’est lui qui me rend malheureuse lorsqu’il ne me comprend pas ou quand j’imagine qu’il en aime une autre ; c’est surtout lui qui m’émeut en me disant “je t’aime”. Il m’est devenu indispensable, et je me sens incomplète sans lui. Je sais que la vie est compliquée à mes côtés. Mais, avec tous les hauts et les bas que nous avons traversés, je suis heureuse de partager ses jours et ses nuits. Et, avec le temps, je sais que tout se renforce entre nous, contrairement à ce que chante Léo Ferré !
Ma famille à Malchin n’aurait jamais imaginé ça. Pas plus qu’un jour je jouerais mon propre rôle dans un film. Pourtant, ça s’est fait, et aux côtés d’une grande actrice francophone, Cécile de France. Dans Un monde plus grand, elle incarne mon amie Corine Sombrun, que j’avais accompagnée plusieurs fois en tant que guide et interprète. Moi, la montagnarde de l’Uvs, je découvris donc l’univers du cinéma. En plus de jouer mon rôle devant les caméras de Fabienne Berthaud, j’assurai la logistique et l’intendance du tournage : une sacrée organisation que d’accueillir soixante-dix personnes durant quatre semaines dans la taïga, loin de toute infrastructure ! Il fallait monter un camp d’une trentaine de yourtes. Et trente yourtes, ça ne se trouve pas en un jour? Bien avant le feu vert de la production, je me souviens donc d’avoir pris un risque énorme :
“Il nous reste très peu de temps avant le tournage. Puis-je lancer la fabrication des yourtes et des meubles ? demandai-je à l’une des productrices.
— Non, Naraa, ça n’est pas sûr qu’on puisse tourner cette année. On ne peut pas se permettre de dépenser le moindre euro tant que notre budget n’est pas validé.
— D’accord, j’attendrai”, mentis-je.
Je raccrochai et, sans réfléchir une minute de plus, j’appelai mon artisan pour annoncer la nouvelle : “Démarrez la fabrication immédiatement ! Que le film se fasse ou pas, je vous paierai tout.”
C’était de la folie, mais cette initiative me permit de recevoir l’équipe du film dès l’annonce soudaine du tournage. Avec le recul, je m’aperçois que, dans les moments cruciaux de ma vie, j’ai toujours agi instinctivement, sans penser aux conséquences. J’aime ces moments tendus où l’indécision a des effets plus néfastes que l’action immédiate. Je m’y sens soutenue par mon père et Chovka ! On me dit souvent que je suis comme une tornade dans un jeu de quilles, mais c’est alors que je perçois la présence des êtres chers disparus. »
(p. 268-270)
Le commissaire de la propreté (p. 67-68)
Les mois d’égarement (p. 196-197)
Extrait court