Un Noël dans les nuages :
« Les douaniers turcs sont tendus. Leur vigilance est renforcée par l’attentat qui a eu lieu à Istanbul trois jours auparavant. Mais à la vue de Rustine, ils oublient leurs préoccupations et nous implorent de leur tirer le portrait, adossés à la machine.
Nous atteignons Edirne, la ville rouge, à la dernière prière de la journée. Les cantillations coraniques nous souhaitent la bienvenue en terre turque et se perdent dans les venelles de la vieille ville. Nous plongeons soudainement dans l’onirique de l’Orient.
Capitale de l’Empire ottoman au XVe siècle, Edirne a su conserver son caractère prestigieux. La mosquée Selimiye Camii trône sur les hauteurs de la cité comme une flamme protectrice. Malgré les bons auspices de cette gardienne séculaire, Andrinople a connu tout au long de son histoire des conflits à répétition au cours desquels se jouait le sort de son allégeance à l’administration turque ou grecque. Le point stratégique qu’elle représentait aux portes même de Constantinople a donc fait ballotter la ville, baptisée tantôt Edirne, tantôt Andrinople, selon son rattachement à l’Empire ottoman ou à l’administration hellénique.
Les douceurs du miel rayonnent sur les étals de la rue Saraçlar. Une fois de plus, les foies de volaille constituent des mets de choix pour sustenter l’estomac des voyageurs.
Au détour d’une ruelle, nous dénichons une minuscule chambre dans un hôtel sans nom. La rigueur du climat ne nous permet plus de dormir dans Rustine. Même à l’abri, dans les dortoirs monacaux des pensions dont nous sommes friands, les épaisses couvertures mitées sont les bienvenues. Enfin, Istanbul se dresse face à nous. Cette ville à cheval entre l’Europe et l’Asie est pour nous une étape symbolique.
Nous posons nos bagages dans une cahute branlante de Sultanahmet, le vieux quartier ottoman où sont érigées les majestueuses Sultan Ahmet Camii (mosquée Bleue) et Aya Sofya (Sainte-Sophie). Pour un prix dérisoire, nous y resterons plusieurs semaines afin de fêter le jour de l’an sous les cieux orientaux et préparer la suite de notre voyage. En cette période de fêtes, nous n’avons droit pour ce prix qu’au coin de couloir de la pension blafarde, entre les douches et les toilettes. Comme on dit, “à cheval donné, on ne regarde pas les dents”.
Les yeux écarquillés, nous déambulons à travers les rues de Sultanahmet et profitons de notre première matinée dans la ville portuaire en arpentant les rives de la Corne d’Or et du grand Bosphore. Sur les quais, les pêcheurs retirent à chaque lancer des chapelets de frêles poissons argentés. »
Sous de divins auspices (p. 186-187)
Des îles aux galères (p. 269-270)
Extrait court
« Les douaniers turcs sont tendus. Leur vigilance est renforcée par l’attentat qui a eu lieu à Istanbul trois jours auparavant. Mais à la vue de Rustine, ils oublient leurs préoccupations et nous implorent de leur tirer le portrait, adossés à la machine.
Nous atteignons Edirne, la ville rouge, à la dernière prière de la journée. Les cantillations coraniques nous souhaitent la bienvenue en terre turque et se perdent dans les venelles de la vieille ville. Nous plongeons soudainement dans l’onirique de l’Orient.
Capitale de l’Empire ottoman au XVe siècle, Edirne a su conserver son caractère prestigieux. La mosquée Selimiye Camii trône sur les hauteurs de la cité comme une flamme protectrice. Malgré les bons auspices de cette gardienne séculaire, Andrinople a connu tout au long de son histoire des conflits à répétition au cours desquels se jouait le sort de son allégeance à l’administration turque ou grecque. Le point stratégique qu’elle représentait aux portes même de Constantinople a donc fait ballotter la ville, baptisée tantôt Edirne, tantôt Andrinople, selon son rattachement à l’Empire ottoman ou à l’administration hellénique.
Les douceurs du miel rayonnent sur les étals de la rue Saraçlar. Une fois de plus, les foies de volaille constituent des mets de choix pour sustenter l’estomac des voyageurs.
Au détour d’une ruelle, nous dénichons une minuscule chambre dans un hôtel sans nom. La rigueur du climat ne nous permet plus de dormir dans Rustine. Même à l’abri, dans les dortoirs monacaux des pensions dont nous sommes friands, les épaisses couvertures mitées sont les bienvenues. Enfin, Istanbul se dresse face à nous. Cette ville à cheval entre l’Europe et l’Asie est pour nous une étape symbolique.
Nous posons nos bagages dans une cahute branlante de Sultanahmet, le vieux quartier ottoman où sont érigées les majestueuses Sultan Ahmet Camii (mosquée Bleue) et Aya Sofya (Sainte-Sophie). Pour un prix dérisoire, nous y resterons plusieurs semaines afin de fêter le jour de l’an sous les cieux orientaux et préparer la suite de notre voyage. En cette période de fêtes, nous n’avons droit pour ce prix qu’au coin de couloir de la pension blafarde, entre les douches et les toilettes. Comme on dit, “à cheval donné, on ne regarde pas les dents”.
Les yeux écarquillés, nous déambulons à travers les rues de Sultanahmet et profitons de notre première matinée dans la ville portuaire en arpentant les rives de la Corne d’Or et du grand Bosphore. Sur les quais, les pêcheurs retirent à chaque lancer des chapelets de frêles poissons argentés. »
(p. 45-47)
Sous de divins auspices (p. 186-187)
Des îles aux galères (p. 269-270)
Extrait court