Premières découvertes :
« Sur le chemin, je suis d’un œil admiratif ma mère jusqu’au plan incliné. Dans la chaleur écrasante de l’été et le bourdonnement lancinant des insectes, quand ma mère cherche, elle n’a pas peur de la Vouivre qui se cache sous les fourrés. Je me penche, je l’ai vu briller, et suis le premier à brandir un coquillage fossile, encore nacré. Une gryphée. Ma mère m’explique : “L’eau était là, il y a des millions d’années, dans le Jura qui a donné son nom à une période géologique, le Jurassique.” Et soudain, du haut de mes 8 ans, je vois l’onde qui s’étendait sur ces dalles de calcaire. Ce jour-là, comme un signe, la récolte de fruits de mer fossilisés se transforma en pêche miraculeuse : cœurs de bœuf, ammonites, bélemnites et, surtout, beaucoup d’autres gryphées, appelées ainsi car ces huîtres étroites et retournées évoquaient aux paysans du Moyen Âge les griffes du diable. J’empoche le fossile, mon fossile, si fier, empli de la joie immense d’avoir découvert un trésor. Et je rentre, mû par la hâte soudaine de me plonger dans les livres et d’en savoir un peu plus sur ce talisman démoniaque, qui m’entraînera, j’en suis convaincu, dans les abysses de la préhistoire. “Les gryphées ou Gryphæa sont un genre de mollusques fossiles ayant vécu au Jurassique et au Crétacé. On trouve de grandes quantités de Gryphæa remontant au Sinémurien.” Gryphæa, Crétacé, Sinémurien. Les noms dansent dans ma tête d’enfant, s’associent en une étrange musique. Je caresse l’objet lisse, chargé de passé. L’inconnu m’absorbe, quand soudain, tiré de ma rêverie par un éclair de curiosité, je prends conscience que ma mère, aveuglée par sa quête, n’a pas eu peur des serpents ; elle, dont l’herpétophobie est pourtant manifeste, s’est avancée sans frémir. Comme j’aurai l’occasion de l’observer maintes et maintes fois, sur d’autres et sur moi-même, l’amour des pierres permet de sortir de soi. »
Pierres de rêve (p. 44-45)
Immensité (p. 64-68)
Traque de météorites (p. 74-78)
« Sur le chemin, je suis d’un œil admiratif ma mère jusqu’au plan incliné. Dans la chaleur écrasante de l’été et le bourdonnement lancinant des insectes, quand ma mère cherche, elle n’a pas peur de la Vouivre qui se cache sous les fourrés. Je me penche, je l’ai vu briller, et suis le premier à brandir un coquillage fossile, encore nacré. Une gryphée. Ma mère m’explique : “L’eau était là, il y a des millions d’années, dans le Jura qui a donné son nom à une période géologique, le Jurassique.” Et soudain, du haut de mes 8 ans, je vois l’onde qui s’étendait sur ces dalles de calcaire. Ce jour-là, comme un signe, la récolte de fruits de mer fossilisés se transforma en pêche miraculeuse : cœurs de bœuf, ammonites, bélemnites et, surtout, beaucoup d’autres gryphées, appelées ainsi car ces huîtres étroites et retournées évoquaient aux paysans du Moyen Âge les griffes du diable. J’empoche le fossile, mon fossile, si fier, empli de la joie immense d’avoir découvert un trésor. Et je rentre, mû par la hâte soudaine de me plonger dans les livres et d’en savoir un peu plus sur ce talisman démoniaque, qui m’entraînera, j’en suis convaincu, dans les abysses de la préhistoire. “Les gryphées ou Gryphæa sont un genre de mollusques fossiles ayant vécu au Jurassique et au Crétacé. On trouve de grandes quantités de Gryphæa remontant au Sinémurien.” Gryphæa, Crétacé, Sinémurien. Les noms dansent dans ma tête d’enfant, s’associent en une étrange musique. Je caresse l’objet lisse, chargé de passé. L’inconnu m’absorbe, quand soudain, tiré de ma rêverie par un éclair de curiosité, je prends conscience que ma mère, aveuglée par sa quête, n’a pas eu peur des serpents ; elle, dont l’herpétophobie est pourtant manifeste, s’est avancée sans frémir. Comme j’aurai l’occasion de l’observer maintes et maintes fois, sur d’autres et sur moi-même, l’amour des pierres permet de sortir de soi. »
(p. 11-12)
Pierres de rêve (p. 44-45)
Immensité (p. 64-68)
Traque de météorites (p. 74-78)