Lieux publics, espace privé :
« Le musée est un révélateur du monde. À chaque bain, s’infuser, s’exposer avant de tester un autre réglage que le sien. Le monde dans toutes ses réalités, sa grandeur, ses infinis détails, les obsessions intimes des uns, les intérêts des autres, des lueurs fugaces, des frontières alléchantes, tout est là. Le musée n’est pas un être organique, il est le fruit récolté de la pensée, traces du temps et langage, scène publique, théâtre vivant, un théâtre dont nous sommes les specta-auteurs, animant les salles de notre attention démultipliée. “L’écho répond à l’écho, tout se répercute”, disait Braque : l’art est avide de tous les sons et de tous les regards.
On affectionne d’autant plus ces lieux publics qu’on parvient à s’y créer un espace privé, parmi des invités du monde entier. On s’y croise, se mélange, se heurte aussi parfois, mais on garde l’impression de marcher à l’amble avec une foule d’anonymes, grâce au paysage commun qu’est le lieu qu’on arpente. Musée des Beaux-Arts de Lyon, tableau de Monet, Étretat, mer agitée : on perçoit le bruit des galets rouler sous le déferlement des vagues, mais c’est le bruit des pas du public qui procure cette “son-sation”. L’amateur d’art a besoin que les œuvres brillent sous le feu d’une multitude de regards pour se réjouir aussi, sentir un élan partagé, une contagion des plaisirs et des réactions, entendre ces mille voix commenter ou se taire – ce qui est parfois plus significatif. On ne peut pas tout aimer ni s’éprendre de chaque chose. »
Naissance d’une institution (p. 13-16)
Facétieux et vigilants gardiens (p. 60-63)
L’art et les lettres (p. 74-76)
« Le musée est un révélateur du monde. À chaque bain, s’infuser, s’exposer avant de tester un autre réglage que le sien. Le monde dans toutes ses réalités, sa grandeur, ses infinis détails, les obsessions intimes des uns, les intérêts des autres, des lueurs fugaces, des frontières alléchantes, tout est là. Le musée n’est pas un être organique, il est le fruit récolté de la pensée, traces du temps et langage, scène publique, théâtre vivant, un théâtre dont nous sommes les specta-auteurs, animant les salles de notre attention démultipliée. “L’écho répond à l’écho, tout se répercute”, disait Braque : l’art est avide de tous les sons et de tous les regards.
On affectionne d’autant plus ces lieux publics qu’on parvient à s’y créer un espace privé, parmi des invités du monde entier. On s’y croise, se mélange, se heurte aussi parfois, mais on garde l’impression de marcher à l’amble avec une foule d’anonymes, grâce au paysage commun qu’est le lieu qu’on arpente. Musée des Beaux-Arts de Lyon, tableau de Monet, Étretat, mer agitée : on perçoit le bruit des galets rouler sous le déferlement des vagues, mais c’est le bruit des pas du public qui procure cette “son-sation”. L’amateur d’art a besoin que les œuvres brillent sous le feu d’une multitude de regards pour se réjouir aussi, sentir un élan partagé, une contagion des plaisirs et des réactions, entendre ces mille voix commenter ou se taire – ce qui est parfois plus significatif. On ne peut pas tout aimer ni s’éprendre de chaque chose. »
(p. 36-37)
Naissance d’une institution (p. 13-16)
Facétieux et vigilants gardiens (p. 60-63)
L’art et les lettres (p. 74-76)