Les Prouesses de l’apnée, Petites divagations aux confins du souffle et de la volonté
Yann Benoist
L’apnée est devenue une passion française. Plusieurs champions nationaux se sont illustrés dans cette discipline, et l’aura d’un Jacques Mayol, d’un Loïc Leferme ou d’un Guillaume Néry suscite toujours de nouvelles vocations. Les clubs d’apnée se multiplient, la discipline elle-même évolue et se structure autour de catégories réglementées : l’apnée statique, qui consiste à rester immergé le plus longtemps possible ; l’apnée dynamique, qui consiste à parcourir la plus longue distance sous l’eau ; l’apnée en profondeur, popularisée par la pratique du no limit dans Le Grand Bleu (1988), qui consiste à atteindre sans respirer la plus grande profondeur. Les records tombent, la fascination fait naître des initiatives originales, comme les performances sous-marines réalisées en danse par Julie Gautier, ou le clip aquatique de Beyoncé, Runnin’ (2015), avec Guillaume Néry.
? Fascination » est bien le mot qui convient lorsque l’on parle d’apnée. Pourquoi, dépouillé de tout accessoire, plonger dans un milieu dans lequel il est impossible de respirer, et chercher à y rester le plus longtemps possible ? Comment, physiologiquement, retenir sa respiration plus de dix minutes, comme le fait Stéphane Mifsud, champion du monde d’apnée statique, ou descendre sans équipement à plus de 110 mètres de profondeur, dans les froides ténèbres du vaste océan ? Ces expériences, ces chiffres semblent insensés ; ils bouleversent les représentations que nous avons des conditions nécessaires à l’existence humaine. L’apnée devient une discipline de l’au-delà, une expérimentation de la vie au-delà de la respiration ; et les apnéistes, à chaque immersion, explorent une autre dimension de la vie, extrême.