Estepa y desierto :

« Il est des pays où l’enfant apprend à monter à cheval en même temps qu’à marcher. Des contrées où l’équitation reste le seul moyen de se déplacer, où l’homme n’a nul besoin de parcourir des milliers de kilomètres en voiture. Où il sait rester en paix avec lui-même. Il m’est apparu que je ne pouvais découvrir de telles contrées qu’en étant l’égal de leurs habitants, en adoptant leurs coutumes et surtout en allant à leur rencontre comme ils venaient à la mienne, à cheval. Découvrir les merveilles naturelles de la Patagonie en omettant les hommes qui la peuplent revient à manquer une partie de son trésor. Mes montures m’ont permis d’être reçu comme rarement je le fus, et les portes, qui ne sont ici jamais fermées au visiteur, s’ouvrirent plus grandes encore. L’étranger qui affronte le désert et son vent incessant trouve toujours un accueil à la mesure de l’immensité de la steppe où il a chevauché. Et il est bon, quand tombe le soir après l’isolement du jour, d’atteindre l’estancia où, sans même connaître le maître des lieux, on peut déjà se réjouir à l’idée de partager avec lui un maté réconfortant et l’asado si délicieux. Il est de tradition en Patagonie d’offrir le gîte et le couvert à quiconque est de passage. On ne saurait laisser dehors le voyageur fourbu. Pour cette raison, lorsqu’ils sont déserts ou abandonnés, le puesto et l’estancia ne sont jamais fermés pour permettre à celui qui s’y arrêterait de rallumer le poêle et de retrouver un peu de chaleur. »

Cordillera (p. 32-33)
Cordillera (p. 40-41)
Cordillera (p. 62-65)