Deux peuples du renne : Évenks et Nénets
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En Sibérie, le renne est un animal autour duquel de nombreuses populations continuent de s’organiser, en réinventant les normes de la tradition. Certaines le chassent, d’autres l’élèvent, beaucoup pratiquent ces deux activités en sus de la pêche.
Les Évenks, eux, peuple toungouse dont l’aire de répartition, du fleuve Ienisseï à l’Amour, est extrêmement étendue, ne consomment que les rennes qu’ils chassent. Certains d’entre eux continuent à mener une vie nomade, qui s’inscrit dans la continuité de la période soviétique : les fermes d’État emploient des brigades (généralement des parents ou amis) qui habitent la forêt. Leurs troupeaux de quelque deux milliers de têtes servent au transport, à la confection de vêtements et d’objets de la vie quotidienne, mais aussi à fabriquer une partie de l’année du fromage, ou comme appât pour le renne sauvage, et relèvent enfin du système cosmologique.
La situation est plus complexe chez les Nénets des forêts, moins connus car guère nombreux, malgré leur parenté avec les Nénets de la toundra dont les troupeaux et la jeunesse vigoureuse font la fierté. Depuis la chute du régime en 1991, les sovkhozes n’emploient quasiment plus personne, laissant les Nénets dans une grande précarité, aggravée par l’attrait incommensurable des compagnies de gaz et de pétrole pour leur territoire, extrêmement riche en hydrocarbures. Si les jeunes continuent parfois de mener une vie semi-nomade, la plupart rêvent de s’installer en ville et de bénéficier du confort urbain. Pour autant, le campement et le village sont des lieux qui permettent de mieux comprendre la manière de « performer » le genre. La binarité du genre chez les Nénets ne se joue pas de la même façon qu’ailleurs : au cours d’une vie d’homme ou de femme, il existe des espaces transitoires entre ces deux catégories, qui se matérialisent autant géographiquement que socialement.
Après son séjour chez les Saami du Nordland, en Norvège, Marine Martin a vécu à deux autres reprises dans des campements d’éleveurs de rennes, que ce soit auprès des Évenks de la région de Krasnoïarsk ou des Nénets des forêts de la région de Khanty-Mansiïsk, en Sibérie. Elle poursuit des études d’ethnologie, sur le genre, à l’EHESS.
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