Pont Royal – Paris (France)
Année 2019
© Amandine Beeken
Le camp :
« Cela fait presque deux mois que j’habite à Jubail, en Arabie Saoudite. J’ai l’impression de n’avoir encore rien fait, rien mis en place, rien vu d’autre que mon compound. Ma vie se rĂ©duit à des promenades redondantes et circulaires, dans les fins d’après-midi. Deux kilomètres, cela peut ĂŞtre long avec deux enfants en bas âge. La partie arrière, cĂ´tĂ© sud, en bordure du mur, n’est pas des plus charmantes, alors nous nous contentons en rĂ©alitĂ© de la façade maritime. Nous y faisons des allers-retours, passant d’une plage à l’autre, de la pointe est à la pointe ouest. Puis vice versa. Nous avançons à petits pas ; je regarde la mer, la ligne de bouĂ©es orange qui dĂ©limite la frontière de notre monde avec le vrai monde. La mĂ©lancolie m’assaille. Ce n’est qu’un petit bras de mer fermĂ© et l’on ne voit rien à l’horizon si ce n’est la rive d’en face. MĂŞme si elle est en Arabie, qu’elle n’est ornĂ©e que d’une mosquĂ©e et de ses minarets, que personne ne s’y promène, cette rive me paraĂ®t belle, vaste, libre. Elle signifie la possibilitĂ© d’une Ă©vasion, de sortir de mon enclos. Comme si, de l’autre cĂ´tĂ© de mes murs, de la ligne de bouĂ©es, sur cette plage d’Arabie, il y avait la libertĂ©. »
Intime Arabie, Confidences saoudiennes
(p. 92-93, Transboréal, ? Voyage en poche », 2020)