Éric Lobo

Prologue :

« Je dois briser le cercle vicieux qui a détruit ma vie professionnelle puis personnelle. Tout est parti en fumée, brutalement, en un rien de temps, comme si une force s’acharnait sur moi. Mon monde s’est effondré tel un château de cartes. Je dois rebondir, mais comment faire ? Faut-il absolument tout lâcher et partir vivre mes rêves ? Quel est le chemin de ma résilience ?
Pendant plusieurs semaines, désorienté et rongé par le désespoir, je vagabonde entre la Provence, où mon père se noie dans la tristesse, et Paname, où vivent mes filles. Pendant cette période trouble, lorsque je doute de moi, je repense à mon passé, me focalise sur les belles choses que j’ai pu accomplir et me replonge dans les aventures auxquelles je me suis livré en tant que photoreporter. La plupart du temps, lorsque je quittais mon activité d’homme d’affaires, c’était pour aller de l’autre côté de la planète chasser des images dans des conditions physiquement éprouvantes. J’en avais profondément besoin. Pour m’aérer l’esprit, pour étancher ma soif de curiosité et réaliser des reportages ethnophotographiques qui me tenaient à cœur, je devais partir m’exposer – que ce soit dans les jungles humides de la Papouasie-Nouvelle-Guinée, sur les plateaux arides du Tibet ou dans la pampa d’Amérique du Sud.
C’est décidé : il me faut m’éloigner de mon quotidien obscur et envisager une autre vie en partant sur de nouvelles bases. Et pour cela, je dois repartir, affronter l’inconnu à nouveau ! Réaliser un projet ambitieux est le seul moyen de tourner la page, de respirer enfin et de retrouver goût à l’existence ! Il me faut accomplir quelque chose qui mobilisera simultanément et intensément toutes mes facultés, mais qui soit aussi relativement “simple” en termes d’organisation : je sais que je ne suis pas en mesure d’élaborer une expédition complexe qui nécessiterait une logistique importante. Pourquoi ne pas mettre cap à l’est, à moto, sans rien préparer sauf la monture et mon matériel photographique ? Voilà une évidence, un rêve que je n’ai pas encore réalisé ! Je pourrais commencer par l’Europe de l’Est, puis traverser le continent pour rallier l’Exposition universelle qui aura lieu à Shanghai ! En quelques minutes, je ne vois même plus d’alternative à mon nouveau projet. Ma décision est arrêtée, et grâce à elle je reprends rapidement du poil de la bête. »