Collection « Sillages »

  • Népal
  • La 2CV vagabonde
  • Ísland
  • Habiter l’Antarctique
  • Cavalières
  • Damien autour du monde
  • À l’ombre de l’Ararat
  • Moi, Naraa, femme de Mongolie
  • Carpates
  • Âme du Gange (L’)
  • Pèlerin de Shikoku (Le)
  • Ivre de steppes
  • Tu seras un homme
  • Arctic Dream
  • Road Angels
  • L’ours est mon maître
  • Sous les yourtes de Mongolie
  • Cavalier des steppes
  • Odyssée amérindienne (L’)
  • Routes de la foi (Les)
  • Aborigènes
  • Diagonale eurasienne
  • Brasil
  • Route du thé (La)
  • Dans les pas de l’Ours
  • Kamtchatka
  • Coureur des bois
  • Aux quatre vents de la Patagonie
  • Siberia
  • Sur la route again
  • À l’écoute de l’Inde
  • Seule sur le Transsibérien
  • Rivages de l’Est
  • Solitudes australes
  • Espíritu Pampa
  • À l’auberge de l’Orient
  • Sans escale
  • Au pays des hommes-fleurs
  • Voyage au bout de la soif
  • Errance amérindienne
  • Sibériennes
  • Unghalak
  • Nomade du Grand Nord
  • Sous l’aile du Grand Corbeau
  • Au cœur de l’Inde
  • Pèlerin d’Orient
  • Pèlerin d’Occident
  • Souffleur de bambou (Le)
  • Au vent des Kerguelen
  • Volta (La)
  • Par les sentiers de la soie
  • Atalaya
  • Voie des glaces (La)
  • Grand Hiver (Le)
  • Maelström
  • Au gré du Yukon
Couverture
Plongée dans l’histoire kirghize :

« Sans nous en rendre compte, étape par étape, jour après jour, l’errance est devenue notre mode de vie. Jusqu’à présent, nous n’en avons retenu que les aspects pragmatiques : où établir le campement, comment choisir l’herbe pour les chevaux, que cuisiner ? Ces besognes sont entrées dans nos habitudes, notre cheminement est devenu naturel ; nous n’avions même jamais perçu de façon globale notre voyage. Rach, qui n’a aucun intérêt à nous encourager ou à nous dissuader, cautionne notre projet et notre manière de l’aborder. Cet homme n’en a sûrement pas conscience mais son respect et son approbation nous apportent une énergie qui nous propulsera pendant tout le voyage.
Par ailleurs, il se dégage de lui quelque chose que nous apprécions chez beaucoup de Kirghizes. Tous ont cette façon de prodiguer un conseil, d’offrir leur aide sans jamais remettre en question notre capacité à atteindre nos objectifs. Ils doutent peut-être mais ne le disent pas ; ils se contentent d’apporter leur pierre à l’édifice et font confiance. Cette attitude, qui consiste à considérer l’autre comme étant maître de ses décisions, à le responsabiliser, se retrouve dans l’éducation des enfants : nous sommes constamment surprises par le degré d’autonomie des bambins. L’interdit n’a pas l’air de faire partie de leur éducation ; ils sont eux aussi laissés libres de leurs décisions et des conséquences qui en découlent. Ils apprennent par mimétisme et tirent les leçons des expériences, en présence d’un adulte si besoin. Cette façon discrète d’aider a sans doute largement contribué à la réussite de notre aventure. Elle nous a permis de prendre confiance, de trouver les ressources nécessaires pour poursuivre le voyage, de nous convaincre que des forces insoupçonnées attendaient en nous…
L’entente est si bonne avec Rach qu’il nous invite à rester quelques jours chez lui, où nous prenons un bon repos. Il en profite pour nous glisser certains conseils d’itinéraires à suivre ou, au contraire, à éviter. Il va même jusqu’à nous offrir des piquets et des cordes plus solides que les nôtres pour attacher les chevaux – peut-être sa manière de s’assurer que nous serons en sécurité, même loin de chez lui. Nous repartons avec la sensation de l’avoir à nos côtés. Rach nous confie d’ailleurs une mission : saluer pour lui la ville de Taldy-Kurgan, à l’est du Kazakhstan, où il fut affecté deux années lors de son service militaire à l’époque soviétique. Notre route devrait nous y conduire, et il trouve amusante l’idée de rallier à cheval ce lieu, qui jadis lui paraissait si lointain.
Ce si bel échange nous fait prendre conscience qu’imperceptiblement, à petits pas, nous concrétisons notre rêve d’enfance. Gamines, nous tentions d’assouvir notre besoin de découverte en nous imaginant accompagner les explorateurs d’antan comme Alexandra David-Néel lors de sa lente avancée vers Lhassa. Ils étaient nos héros et leurs récits nous servaient d’atlas ; nous nous laissions porter par eux. Parfois, une monographie comme les écrits de René Cagnat sur l’Asie centrale et le Kirghizistan, ou un rapport d’expédition tel celui de la traversée de l’Antarctique par l’équipe internationale menée par Will Steger en 1989-1990 attisait notre curiosité. Puis les romans et les essais d’auteurs locaux prirent le relais pour éclairer une culture lointaine : ainsi le Kazakh Abaï Kounanbaïouly et ses poèmes moralisateurs. Tous ces auteurs furent une source intarissable d’enseignements ; leurs mots sont devenus les contreforts auxquels nous adosser pour prendre notre élan et vivre.
Au fil des récits, nos esprits se tournèrent vers l’Asie centrale, et plus particulièrement le Kirghizistan. Pourtant, nous ignorions tout de ce pays. Nos proches, avec qui nous partagions timidement notre doux rêve, s’étonnaient : “Vous allez au Kirghimachinstan ? Pour ensuite filer vers le Kazakoistan ? Mais pourquoi ?” Peut-être tout simplement parce que les noms de Khan Tengri et de Jengish Tchokusu ne cachaient pas uniquement des pics de 7 000 mètres mais un terrain d’aventure et d’expérience personnelle. Sans parler du nom des Tian Shan qui, à lui seul, a décuplé nos envies d’évasion.
Nous avions aussi en tête une culture empreinte de nomadisme malgré des décennies de communisme. Pour nous, ces terres représentaient un véritable carrefour de civilisation depuis l’époque de Manas ou de Gengis Khan. Des périodes qui ont façonné le Turkestan, devenu l’héritage commun de brillantes civilisations, sédentaires et nomades…
Nous prenons conscience que cet imaginaire qui avait provoqué notre départ est aujourd’hui en train de prendre vie au fil des pas. Chaque vallée découverte, chaque yourte, chaque ruisseau franchi font de ce rêve une réalité. »
(p. 156-158)

Un col initiatique (p. 49-51)
Frontières immuables (p. 67-68)
Extrait court
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