Collection « Petite philosophie du voyage »

  • Défis de la course (Les)
  • Écho des bistrots (L’)
  • Quête du naturaliste (La)
  • Instinct de la glisse (L’)
  • Vertiges de la forêt (Les)
  • Voyage en famille (Le)
  • Tao du vélo (Le)
  • Parfum des îles (Le)
  • Appel de la route (L’)
  • Bonheurs de l’aquarelle (Les)
  • Euphorie des cimes (L’)
  • Malices du fil (Les)
  • Ivresse de la marche (L’)
  • Force du silence (La)
  • Secret des pierres (Le)
  • Frénésie du windsurf (La)
  • Prouesses de l’apnée (Les)
  • Vie en cabane (La)
  • Fureur de survivre (La)
  • Art de la trace (L’)
  • Voyage dans l’espace (Le)
  • Ronde des phares (La)
  • Frisson de la moto (Le)
  • Légèreté du parapente (La)
  • Poésie du rail (La)
  • Hymne aux oiseaux (L’)
  • L’Engagement humanitaire
  • Grâce de l’escalade (La)
  • Temps du voyage (Le)
  • Vertu des steppes (La)
  • Facéties du stop (Les)
  • Cantique de l’ours (Le)
  • Esprit du geste (L’)
  • Écriture de l’ailleurs (L’)
  • Rythme de l’âne (Le)
  • Chant des voiles (Le)
  • Liberté du centaure (La)
  • Tour du monde (Le)
  • Fièvre des volcans (La)
  • Extase du plongeur (L’)
  • Tentation du jardin (La)
  • Vie à la campagne (La)
  • Murmure des dunes (Le)
  • Goût de la politesse (Le)
  • Caresse de l’onde (La)
  • Magie des grimoires (La)
  • Audaces du tango (Les)
  • Simplicité du kayak (La)
  • Voyage immobile (Le)
  • Attrait des gouffres (L’)
  • Soif d’images (La)
  • Mémoire de la Terre (La)
  • Enchantement de la rivière (L’)
  • Prodige de l’amitié (Le)
  • Promesse de l’envol (La)
  • Mystères du vin (Les)
  • Religion du jazz (La)
  • Charme des musées (Le)
  • Triomphe du saltimbanque (Le)
  • Sortilèges de l’opéra (Les)
  • Âme de la chanson (L’)
  • Sérénité de l’éveil (La)
  • Arcanes du métro (Les)
Couverture
Éveil des sens :

« Si le sens de l’orientation est parfois perturbé, tous les autres sont stimulés sous l’eau. Le toucher est important, bien qu’il soit préférable de ne pas poser la main sur les organismes vivants – certains plongeurs conservent un cuisant souvenir de leur contact avec le corail de feu… L’eau est caressante, quoique parfois froide et mordante, et le plongeur est particulièrement sensible aux changements de température, comme en Méditerranée où la thermocline fait perdre quelques degrés de manière nette à une certaine profondeur.
Le courant remplace le vent en surface. Il faut lui résister ou, au contraire, s’y abandonner – c’est un classique des passes aux Maldives. Une passe est une ouverture dans la barrière corallienne qui permet au flux d’entrer ou de sortir de l’atoll et, lorsque le courant est si fort que les bulles expirées dansent à l’horizontale au lieu de remonter, il suffit de se laisser entraîner sans effort en admirant le spectacle du paysage qui défile, comme un travelling au cinéma.
Quant à l’ouïe, le “monde du silence” – qui ne porte pas si bien son nom que cela – ne lui est pas inconnu. Loin de là même, car les sons se propagent plus vite dans l’eau que dans l’air. Et quand bien même il ne parle pas, le plongeur est bruyant sous l’eau ; il s’entend inhaler et expirer son ballet de bulles. Certains animaux émettent aussi des sons clairement perceptibles : poissons-perroquets qui croquent le corail avec leur bec robuste et produisent un raclement caractéristique, poissons-clowns qui grognent pour éloigner le curieux… J’ai eu la chance de capter le cliquetis net et presque métallique des dauphins que je cherchais du regard, moment aussi réjouissant que frustrant, car il n’est pas si fréquent de voir ces majestueux cétacés sous l’eau.
De manière plus surprenante, le goût n’est pas absent de l’univers de la plongée, par la saveur iodée du détendeur et de l’eau sur le visage à la surface, mais aussi par les repas préparés sur les bateaux de croisière où se déguste du poisson fraîchement pêché. L’odorat aussi a sa place ; j’en ai eu la preuve lors d’une de mes plongées les plus insolites. J’étais au Mexique, réputé pour ses cénotes. Ces puits issus de l’effondrement de grottes sont reliés les uns aux autres par des boyaux inondés où l’eau est douce en surface et salée plus bas. Le majestueux cénote Angelita, avec ses 40 mètres de diamètre, est situé en pleine forêt tropicale, près de Playa del Carmen. On y découvre des branches, tombées au fond d’une eau cristalline, qui émergent d’un brouillard opaque, créant un paysage enchanteur où les plongeurs se métamorphosent en insectes virevoltant dans l’air limpide d’une forêt fantomatique. Je suis descendue jusqu’à cette brume stagnante et épaisse ; quelle ne fut pas alors ma surprise d’être assaillie, malgré le masque, par une odeur d’œuf pourri – la couche est constituée de sulfure d’hydrogène ! Dessous, c’était l’obscurité totale, et j’ai continué à la lampe torche. En levant la tête, le ciel m’est apparu teinté d’un intense vert anis, la lumière du soleil étant filtrée par la strate soufrée. Je l’ai à nouveau traversée et ai observé mes compagnons de plongée jaillir du brouillard comme s’ils naissaient du néant.
La vue, évidemment, est essentielle pour profiter du spectacle sous-marin, mais elle est parfois trompeuse. La Méditerranée est connue pour ses gorgones, ces animaux dont les branches couvertes de polypes en corolle ressemblent à des éventails de fleurs. Leur forme est harmonieuse, équilibrée, mais elles semblent d’un noir bien triste. Jusqu’à ce qu’elles soient éclairées ; l’éclat de leur rose et l’intensité de leur pourpre sont une réelle surprise ! L’eau piège en effet certaines fréquences du spectre lumineux et en premier lieu le rouge, selon un phénomène bien connu des photographes. C’est ainsi qu’une fois où je m’étais égratignée sous l’eau, mon sang m’est apparu vert foncé !
Pour appréhender le foisonnement de couleurs cachées sous la mer, une lampe est indispensable. De nuit, le noir est total et la vue limitée à son faisceau. Si vous l’éteignez, vous serez environné de ténèbres insondables. Amusez-vous à remuer l’eau ; étincellent soudain des nuées de points bleus, spectacle féerique du plancton végétal qui réagit à l’agitation en produisant sa propre lumière. Vous nagerez alors dans une constellation vivante, un ciel fantasmagorique… »
(p. 15-19)

Évoluer sous l’eau (p. 26-28)
Luxuriance sous-marine (p. 51-53)
Extrait court
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