ÃŽle d’Hoëdic – Morbihan (France)
Année 2013
© Émeric Fisset
Née de Chefdebien-Zagarriga en 1969 à Paris, d’une mère bretonne et d’un père aux lointaines origines catalanes, Christine Fisset passe les huit premières années de sa vie à Arzew et à Alger, dont elle conserve le souvenir d’une cohabitation heureuse entre communautés française et algérienne, pourtant au sortir de la guerre d’indépendance. Sa famille retourne en France en 1978 pour s’établir en Gironde, dans les Graves. Elle est scolarisée à Portets où, alors même qu’elle n’a jamais connu le moindre rejet outre-Méditerranée, son jeune camarade de classe harki Malik est l’objet de brimades racistes de la part de son maître et de ses camarades. Cette expérience est fondatrice pour l’enfant qu’elle est encore, qui perçoit très tôt un malaise social lié à la question irrésolue de l’intégration des immigrés en France.
Ensuite lycéenne, Christine Fisset s’intéresse à la ? Marche des Beurs » en 1983 puis à la création de SOS Racisme un an plus tard. Marquée par l’atmosphère interculturelle de sa petite enfance et initiée aux problématiques internationales par son père curieux de géopolitique, elle rêve d’exercer un métier au contact des étrangers. Dans la capitale bordelaise, elle mène des études à l’Institut d’études politiques et apprend la langue russe, qu’elle trouve la plus belle du monde après le français. Elle effectue en trois ans une dizaine de voyages vers la patrie de Tolstoï, dont elle découvrira dix ans plus tard les confins orientaux, par la voie mythique du Transsibérien.
Christine Fisset entre au ministère des Affaires étrangères en 1997, via le concours de secrétaire des Affaires étrangères – cadre d’Orient. Elle y passe six ans, d’abord à Paris à la direction de la coopération européenne, où elle est notamment chargée de mission pour la présidence française de l’Union européenne, puis à l’ambassade de France à Budapest en tant que premier secrétaire chargée des médias et des relations extérieures de la Hongrie. Elle ne perd pas de vue pour autant la situation des étrangers dans l’Hexagone et prend la mesure de la montée des tensions dans les banlieues dès la fin des années 1990.
En 2003, convaincue qu’elle se serait finalement plus utile à travailler au service des étrangers en France plutôt que pour la France à l’étranger, Christine Fisset décide de rentrer à Paris. Elle entend au mois d’août de cette même année, à Paray-le-Monial en Saône-et-Loire, le témoignage de Cyril Tisserand, éducateur chrétien engagé auprès des jeunes dans le cadre de l’association Le Rocher Oasis des Cités qu’il vient de lancer à Bondy nord en Seine-Saint-Denis. La fonctionnaire du Quai d’Orsay se sent alors confortée dans son aspiration à travailler au contact des populations immigrées des banlieues. Sa découverte, un an plus tôt à Assise, de la spiritualité du Poverello la fait également aspirer à une vie plus authentiquement fraternelle.
Christine Fisset demande alors à être détachée de son ministère d’origine vers diverses administrations, au service du développement social et urbain des quartiers en difficulté. Son objectif est de travailler sur cette même problématique dans différents postes, en vue d’acquérir la vision la plus complète possible des solutions à y apporter. D’abord directrice de la politique de la ville à Montfermeil, en Seine-Saint-Denis, en 2004 sous la houlette de son énergique maire Xavier Lemoine, elle est ensuite nommée en 2007 conseillère technique au cabinet de Christine Boutin, ministre du Logement et de la Ville, puis part en 2009 à Châlons-en-Champagne comme chargée de mission ? politique de la ville » à la préfecture de région Champagne-Ardenne, complétant ainsi son expérience francilienne par la découverte d’un autre contexte régional.
À Montfermeil, un mois après les émeutes urbaines de novembre 2005, Christine Fisset lance, aux côtés de la première adjointe au maire Rosine Bellanger, un ? défilé des cultures, de la tradition à la création », qui rassemble dès sa première édition 600 spectateurs de 40 nationalités différentes. Au ministère de la Ville, elle travaille au volet emploi de la dynamique ? Espoir banlieues » lancée par la secrétaire d’État à la Ville Fadela Amara, au développement des dispositifs de ? deuxième chance » pour des jeunes en voie de marginalisation et élabore une charte de partenariat avec les grands réseaux associatifs et les fédérations agroalimentaire, grande distribution et transports, pour développer l’aide alimentaire. Elle élabore ensuite pour la Champagne-Ardenne un programme d’intégration des immigrés, ainsi qu’un plan de lutte contre l’illettrisme, et initie la régionalisation de l’hébergement d’urgence des demandeurs d’asile.
Parallèlement à sa carrière professionnelle, Christine Fisset s’engage comme bénévole à l’association Le Rocher Oasis des Cités à Bondy en 2004, pour de l’accompagnement à la scolarité et des camps d’été d’adolescents, et participe en 2005-2006 à un groupe de réflexion sur l’identité, composé de sept personnes de nationalités différentes vivant en Seine-Saint-Denis. Elle fréquente ensuite à partir de 2010 une fraternité de laïcs franciscains à Cormontreuil, dans la Marne, puis à Clichy-sous-Bois en Seine-Saint-Denis, et s’engage en 2013 dans Alliance Vita, dirigée par Tugdual Derville, qui vise à aider les personnes confrontées aux épreuves de la vie et à sensibiliser l’opinion publique et les décideurs à la protection de la vie humaine de sa conception à la mort naturelle.
À l’issue de sa dernière expérience administrative, Christine Fisset décide en 2012 de parfaire sa compréhension de la réalité des quartiers sensibles en faisant le saut d’un engagement ? sur le terrain », cette fois en tant que salariée, au sein de l’association Le Rocher qui s’est entre-temps étendue à sept autres cités en métropole. Elle y est recrutée comme responsable des relations institutionnelles au sein de l’équipe nationale. Le premier principe du Rocher étant d’avoir des équipes qui ont fait le choix de vivre dans le quartier où l’association est présente, la nouvelle recrue s’établit à Bondy nord.
Avec Émeric Fisset, qu’elle a épousé en 2014, Christine Fisset désire désormais développer un projet à dimension à la fois environnementale et sociétale, s’inscrivant dans le champ de la bienveillance et de l’écologie, en s’alliant avec des personnes aux aptitudes complémentaires. Pour ce faire, le couple a recherché un site destiné à accueillir cinquante étudiants de septembre à mai et toute sorte d’autre public, si possible dans un cadre patrimonial. Après deux ans à l’abbaye de Bonnecombe, en Aveyron, leur choix s’est porté sur le couvent du Cénacle, à Lalouvesc, dans le Vivarais, au nord de l’Ardèche. Dans ce lieu, de pèlerinage sur les tombes de saint Jean-François Régis et de sainte Thérèse Couderc, de villégiature pour les habitants de la vallée du Rhône, sis sur un col à 1 092 mètres d’altitude, ouvrira en septembre 2024 le cursus de l’Association Propolis, qu’elle dirigera.