À Chorges – Hautes-Alpes (France)
Année 2020
© Anthony Komarnicki
Née à Fréjus en 1975, Johanna Nobili a grandi non loin de la mer et des embruns, au milieu des pins et des senteurs de la garrigue. Avant que le vol du goéland ne lui parle plus intimement qu’à d’autres, elle découvre les nombreuses activités sportives que l’on peut pratiquer dans la nature. Rapidement, elle les conjugue avec le bivouac, car pourquoi rentrer à la maison quand on peut observer le soleil disparaître à l’horizon et regarder poindre le jour tout en continuant son chemin. Ces immersions en pleine nature font tellement partie de sa vie qu’après être sortie diplômée de Télécom Paris en 1999 et avoir créé une ? jeune pousse » dans le domaine du multimédia, elle fonde fin 2003 avec Olivier, son mari, le magazine Carnets d’aventures dont elle est rédactrice en chef. Le voyage itinérant sans moyen motorisé et le bivouac sont le cœur de la ligne éditoriale de ce trimestriel qui rassemble un lectorat enthousiaste. Quand on l’interroge sur ses plus belles expériences de voyage, elle répond en citant une traversée de la Méditerranée en kayak de mer durant deux mois dont une traversée hauturière de quarante-deux heures d’affilée – périple qui est à l’origine du magazine –, une longue marche en Mongolie, une traversée de l’Islande à pied et, à nouveau en kayak, des mois cumulés de navigation le long des côtes et îles croates, grecques, italiennes, corses, norvégiennes, suédoises ou islandaises?
En 2007, Johanna Nobili prend véritablement conscience de l’impact énorme du transport aérien dans son bilan carbone personnel ; depuis, elle ne prend plus l’avion et essaie de concevoir des voyages plus respectueux de la nature mais non moins palpitants, persuadée que l’exotisme ne se cache pas forcément au bout du tarmac. À travers les pages de Carnets d’aventures, elle souhaite donner de la valeur aux destinations géographiquement proches, en montrant que la France et les très nombreux pays accessibles par les transports de surface recèlent des joyaux et des terrains de jeu et de découverte infinis.
Les origines méditerranéennes de Johanna Nobili l’ont sans doute d’abord naturellement poussée vers le kayak et la mer. Un milieu en mouvement perpétuel, qui n’est pas naturel pour l’homme et qui nécessite, pour le comprendre et s’en faire un allié, une attention et une sensibilité particulières. Les goélands, en dessinant des courbes fécondes dans son inconscient, seraient-ils les artisans d’une nouvelle passion, celle de l’air ? Au début de l’existence de Carnets d’aventures, elle part vivre dans les montagnes des Hautes-Alpes. Elle découvre parmi ses nouveaux voisins les aigles, les vautours, les chocards, mais aussi des humains volant à leurs côtés, portés par un bout de tissu coloré. En 2012, elle réalise son premier stage de parapente : ses pieds quittent le sol et son esprit s’envole pour ne jamais vraiment redescendre. Elle se sent si à son aise, suspendue aux nuages sous sa petite toile, cheveux au vent, à partager le ciel avec les oiseaux, qu’elle prolonge les vols, se balade de montagne en montagne, de massif en massif, expérimentant cette étrange sensation de pouvoir se libérer des contraintes terrestres. Du cross au vol randonnée, incluant parfois des bivouacs, elle s’essaie avec une joie intense aux multiples facettes de l’activité qui lui procurent une profonde sensation de liberté. Ayant obtenu en 2020 la qualification biplace, elle partage sa passion avec quiconque lui fait le plaisir d’être son passager pour des vols en tandem.
Lorsqu’elle se pose, Johanna Nobili prend le temps d’explorer d’autres chemins, toujours en accord avec sa quête de liberté. Ceux de l’esprit, avec l’hypnose ericksonienne, à laquelle elle se forme pendant deux ans et dont elle devient une praticienne en 2015, et ceux du corps qui la conduisent à expérimenter d’autres façons de se nourrir : elle pratique ainsi depuis quelques années le jeûne quotidien, qui consiste à ne rien manger en dehors d’une période de cinq heures consécutives en fin de journée, expérience qu’elle ponctue parfois d’une itinérance de plusieurs jours dans la nature sans s’alimenter. L’acclimatation au froid fait également partie de son domaine d’exploration. Loin de tout ésotérisme, ces usages visent à prendre conscience et à développer des capacités oubliées et peu exploitées de notre corps, à dépasser les croyances qui nous empêchent d’avancer. Ne pas avoir besoin de manger et résister au froid permet de vivre avec encore plus de plaisir des vols de plusieurs heures perchée au-dessus des plus hauts sommets alpins.