Village de Boubonitsy, sur le plateau du Valdaï – district de Toropets, oblast de Tver (Russie)
Année 2015
© Olga Gauthier
Né à Kamensk, en Russie soviétique, en 1936, Valentin Pajetnov se prend de passion pour la nature et la vie sauvage dès son plus jeune âge, une passion qui le mettra sur les chemins de l’école buissonnière et le détournera d’une scolarité normale. Il n’a pas 16 ans quand il est embauché comme ouvrier dans une usine de sa ville natale, appelée aujourd’hui Kamensk-Chakhtinski (? Kamensk-les-Mines »), à proximité de Rostov-sur-le-Don, où il acquiert plusieurs métiers : charpentier, soudeur, mécanicien, camionneur. Les trois années de service militaire qu’il passe dans l’Extrême-Orient russe lui permettent d’entrevoir la taïga de la façade du Pacifique et le confortent dans sa vocation : il sera trappeur.
En 1959, Valentin Pajetnov s’établit en Sibérie, sur le fleuve Ienisseï, et se fait employer dans une coopérative de chasseurs professionnels. Outre la chasse aux bêtes à fourrure, il pratique l’exploration en solitaire et la pêche. Au bout de quelques années, il constate que le métier ne lui apporte pas les connaissances qu’il espère du monde animal, et il entreprend de se remettre aux études. En 1963, il rentre dans sa région natale où il s’installe comme mécanicien-moissonneur. Parallèlement, il est étudiant par correspondance à l’Institut fédéral agricole.
Spécialisé en zoologie, Valentin Pajetnov est engagé dans la Réserve naturelle de la Forêt centrale en 1970 (région de Tver). Il y fait en 1972 la rencontre de sa vie avec le professeur Krouchinski, éminent éthologiste, qui l’encourage à se lancer dans l’étude de terrain de l’ours brun. L’expérience consiste à accompagner des oursons orphelins en se substituant à la mère ourse dans des conditions aussi proches que possible de la vie sauvage. Elle sera couronnée, en 1993, par la soutenance d’une thèse de doctorat ès sciences biologiques. En 1985, Valentin Pajetnov réinvestit avec sa famille un village abandonné du plateau du Valdaï aux sources de la Volga, Boubonitsy, pour y fonder une station biologique baptisée ? Forêt pure ». Son but : pousser plus loin l’étude des ours en les côtoyant, et mettre au point une méthode de raccompagnement des oursons orphelins à la vie sauvage.
Valentin Pajetnov a signé depuis, outre des monographies remarquées, quelques ouvrages de vulgarisation qui lui vaudront la sympathie du grand public, comme Avec les ours (Actes Sud, 1998) ou Une merveille pleine de poils (version russe uniquement, 2004). On lui doit aussi des contes pour enfants écrits dans la grande tradition russe, et dessinés de sa main. Une filmographie d’ores et déjà abondante lui est consacrée, avec notamment Dans la peau de l’ours, réalisé par Catherine Garanger (France 3, 2000). Enfin, Valentin Pajetnov publie en 2008 un livre autobiographique plusieurs fois réédité, récompensé par le prix russe Félix Stilmark ? Nature et Littérature », traduit par Yves Gauthier pour Transboréal sous le titre L’ours est mon maître.
Le 8 juin 2021, Valentin Pajetnov est mort dans sa barque alors qu’il était parti à la pêche aux environs de Boubonitsy, le hameau du plateau du Valdaï où il s’était établi avec toute sa descendance.