Port-Cros, îles d’Hyères – Var (France)
Année 2015
© Charlotte Lanièce
Né à Paris en 1985, Matthieu Delaunay n’a pas baigné dans une ambiance de voyage. Élève dissipé, il passe les nombreuses heures d’étude imposées à découvrir la lecture et dévore ses premiers récits d’aventure. Après une licence de droit, il est diplômé de Sciences-Po Grenoble, avec une spécialisation en journalisme.
C’est en 2007 que Matthieu Delaunay prend goût à la randonnée en compagnie de François Klein, avec qui il arpente à pied les Écrins sur le GR54 et la Corse sur le GR20. À l’hiver 2010, les deux amis entreprennent un voyage à vélo en direction de Vladivostok. Après avoir peiné à sortir de France, du fait de la double fracture de la mâchoire que Matthieu s’est faite à 3 kilomètres de la frontière espagnole, ils poursuivent le voyage au Maghreb, puis vers la Libye en pleine guerre civile. D’Égypte, ils gagnent la Jordanie via le désert du Sinaï mais sont contraints de renoncer à traverser la Syrie en proie aux premiers combats entre les rebelles et l’armée de Bachar Al-Assad. D’Istanbul, les deux coéquipiers gagnent le Kurdistan turc puis pédalent vers la Chine via l’Asie centrale, traversent le désert de Gobi et parviennent à Oulan-Bator. De là, ils continuent jusqu’à Vladivostok, qu’ils atteignent à la fin du mois de septembre 2011. Le retour à bord du Transsibérien s’interrompt sur les rives du lac Baïkal où Matthieu sort miraculeusement vivant d’une chute de 200 mètres dans un ravin. François Klein termine la route seul, et retrouve son compère fin novembre à Lyon, au terme de dix mois d’équipée et 18 000 kilomètres parcourus.
À son retour, Matthieu Delaunay s’établit à Bayonne où il travaille comme journaliste et rédacteur en chef adjoint à La Semaine du Pays basque pendant dix-neuf mois. Il signe par ailleurs des articles pour divers magazines (Wider, Bouts du monde, Top vélo magazine) et donne, avec son fidèle compagnon de route, plusieurs conférences sur leur voyage à vélo.
Après sa parenthèse basque, Matthieu Delaunay travaille comme journaliste au magazine Asie reportages de l’ONG Enfants du Mékong. De 2014 à 2017, le jeune reporter a ainsi l’occasion de partir sept mois sur le terrain. Du Yunnan aux Philippines, il découvre le quotidien d’ouvriers chinois sur des chantiers titanesques, la vie des enfants des rues de Manille ou rencontre les réfugiés karens, à la frontière du Tenasserim. Dans la jungle birmane, sous les pluies de la mousson thaïe ou à travers les bidonvilles de Phnom Penh, il a vu que, là où il y a de la vie, il y a du désespoir. Mais partout, il est marqué par une flammèche qui ne s’éteint jamais : celle de la vitalité et de l’enthousiasme qui brûle chez les habitants de ces pays. De ses expériences, il a tiré le recueil de nouvelles Un parfum de mousson.
À l’été 2017, Matthieu Delaunay part pour Montréal, emmené par sa femme Charlotte qui poursuit ses études en épidémiologie à l’université McGill. Après plusieurs mois à exercer le beau métier de libraire et de coauteur pour la maison d’édition Ulysse, spécialisée dans les guides et récits de voyage, il devient en mai 2018 responsable des communications de la fondation Paul Gérin-Lajoie, ONG qui œuvre depuis quarante ans à la promotion de l’éducation en Afrique de l’Ouest et des Grands-Lacs, mais aussi en Haïti et au Canada.
Au mitan de l’hiver 2020, Matthieu Delaunay part seul traverser la Basse-Côte-Nord à ski avec une pulka, à la rencontre des communautés qui maillent cette ultime partie de ? La Mer » comme les habitants de la Côte-Nord appellent le fleuve Saint-Laurent. Après 500 kilomètres sur la route Blanche qui s’achève à Blanc-Sablon, il retourne sur ses pas pour séjourner dans les communautés innues. Il passe une dizaine de jours à Pakua Shipi, accueilli par une famille, mais doit bientôt rentrer à Montréal en raison de la pandémie de Covid-19. Le carnet, l’appareil photo et l’enregistreur remplis de notes, d’images et de sons, il se consacre alors à rendre l’accueil qui lui a été donné en parlant des paysages qu’il a traversés et des âmes qui les peuplent. Mettant ainsi l’épaule à la roue, il tente de participer à la préservation d’un équilibre fragile et qui mérite d’être préservé vaille que vaille, même si la modernité y a depuis longtemps fait son entrée à coups de bottes.