Le Gansu :
« Les amis sont partis. Je suis seul sous le ciel étoilé à attendre que le soleil se lève. Un petit vent descend des montagnes. Le ciel commence à s’illuminer mais n’en finit pas de prendre les couleurs de l’aurore. J’ai l’impression que l’astre fait du surplace. Je poireaute depuis maintenant deux heures quand, tout à coup, la passe de Jiayuguan s’embrase. À peine ai-je le temps de faire défiler quelques pellicules que les nuages arrivent sur moi au galop. Il ne me reste plus qu’à me mettre en marche. Vaine illusion que de penser échapper à l’orage d’Asie centrale. Il me fond dessus avec ses rafales de pluie. Je marche en essayant de penser à autre chose mais le vent de face est peu propice à la méditation. Je dois me mobiliser entièrement pour regagner mètre après mètre l’avance qu’a prise la caravane. Parole de Breton : le vent souffle, au moins, à quatre-vingts kilomètres à l’heure.
Pas de chameaux, pas de Chinois, personne. Je suis seul à l’ouest de la Grande Muraille. »
Sur la route de la soie en Chine, Du fleuve Jaune aux monts Pamir
(p. 64, Géorama, 1995, rééd. 2002)