La soie dans tous ses états
Guy Blazy revient sur le développement qu’il a apporté, en tant que conservateur, à l’extraordinaire musée des Tissus de Lyon.
L’impératrice Eugénie, Odilon Redon, Guillaume Apollinaire et Catherine Deneuve ont sans doute un seul point commun : ils ont été les visiteurs de marque du prestigieux musée des Tissus de Lyon. Guy Blazy, qui en a pris les rênes en 1994, est conscient de cet héritage. Diplômé de l’école du Louvre, spécialiste du textile et des céramiques, il a assuré la direction des musées de Saint-Omer durant quatorze années. Lorsque, par le jeu des vacances de postes, il eut l’occasion d’effectuer un retour aux sources (sa mère était lyonnaise et son père stéphanois), il ne l’a pas laissé filer : le textile, c’est un peu sa seconde nature…
Dès son arrivée, Guy Blazy a fait œuvre de rassembleur. Abattant la cloison qui séparait le musée des Tissus du musée des Arts décoratifs, il a facilité la circulation des visiteurs entre les deux hôtels particuliers qui les abritent : c’est-à -dire entre deux façons d’aborder le textile, comme produit fini et en situation. Ces vénérables institutions ne s’en trouvèrent pas pour autant bouleversées, car le passé les avait accoutumées aux changements. Si les collections pouvaient parler, elles raconteraient en effet une épopée bien agitée. La genèse du projet, tout d’abord, issu de l’euphorie des grandes expositions universelles du XIXe siècle. En 1864, la chambre de commerce et d’industrie de Lyon créa le musée d’Art et d’Industrie. Mais le programme était trop ambitieux : en 1890, il fut ramené aux seuls textiles, sous l’impulsion d’Édouard Aynard, collectionneur, homme politique, banquier et alors président de la chambre de commerce de Lyon. Les tissus, arrivant d’horizons lointains, n’avaient pas encore achevé leur voyage : en 1950, ils allaient être transférés dans l’hôtel de Villeroy, ancienne résidence du gouverneur du Lyonnais. C’est dans cette demeure somptueuse que se trouve aujourd’hui l’unique musée au monde exclusivement consacré au textile. Ses collections, rivalisant avec celles du Metropolitan Museum of Art et du Victoria & Albert Museum, proposent un extraordinaire parcours à travers les époques, les pays, les matières et les techniques de fabrication. Une vie – fût-elle de conservateur – ne suffirait pas à inventorier les trois millions de pièces qui les constituent. S’il fallait en choisir quelques-unes, Guy Blazy serait tenté de retenir celles qui parlent à son imagination : une tunique pharaonique – la pièce la plus ancienne – et, pour l’étrangeté de leur provenance, une étoffe en toile d’araignée de Madagascar ou un textile en plumes d’autruche du Mexique. Mais le fleuron des tissus présentés, se ravise le gardien de ces lieux, est bien sûr la soierie lyonnaise. Quatre siècles de commandes prestigieuses destinées à garnir les plus riches demeures (les résidences royales des Tuileries, de Versailles ou de Fontainebleau comme les palais impériaux du Premier Empire) et à habiller les grands de ce monde (de Joséphine de Beauharnais aux princesses de Russie ou aux infantes espagnoles), sans oublier la production d’ornements liturgiques, où s’illustrèrent des maisons telles que Tassinari & Chatel ou Lamy & Giraud. Décidément, la visite de ce musée le confirme : la soie est bien l’apanage des dieux et des rois !
Musées des Tissus et des Arts décoratifs
34, rue de la Charité
69002Â Lyon
tél. 04 78 38 42 00
fax 04 72 40 25 12
site www.musee-des-tissus.com
Portrait rédigé par : Gaële de La Brosse
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