Collection « Sillages »

  • Dans les pas de l?Ours
  • Au gr? du Yukon
  • Damien autour du monde
  • Maelstr
  • Unghalak
  • Au vent des Kerguelen
  • Grand Hiver (Le)
  • Voie des glaces (La)
  • Atalaya
  • Par les sentiers de la soie
  • P?lerin d?Orient
  • Volta (La)
  • Nomade du Grand Nord
  • Souffleur de bambou (Le)
  • Seule sur le Transsib?rien
  • Kamtchatka
  • Sous les yourtes de Mongolie
  • P?lerin d?Occident
  • Au c?ur de l?Inde
  • Cavalier des steppes
  • Sous l?aile du Grand Corbeau
  • Sib?riennes
  • Au pays des hommes-fleurs
  • Voyage au bout de la soif
  • Coureur des bois
  • Errance am?rindienne
  • ? l?auberge de l?Orient
  • Sans escale
  • Esp?ritu Pampa
  • Aux quatre vents de la Patagonie
  • Rivages de l?Est
  • Solitudes australes
  • Sur la route again
  • Road Angels
  • ? l??coute de l?Inde
  • Siberia
  • Brasil
  • Route du th? (La)
  • Diagonale eurasienne
  • Routes de la foi (Les)
  • Aborig?nes
  • Odyss?e am?rindienne (L?)
  • ?me du Gange (L?)
  • L?ours est mon ma?tre
  • Arctic Dream
  • Tu seras un homme
  • Ivre de steppes
  • P?lerin de Shikoku (Le)
  • Carpates
  • Moi, Naraa, femme de Mongolie
  • ? l?ombre de l?Ararat
  • Cavali?res
  • Habiter l?Antarctique
  • ?sland
  • La 2CV vagabonde
  • Namaste
Couverture
Hadji Fran?ois :

« Les montagnes s?agenouillent pour ouvrir un passage vers la Syrie. Le d?fil? ne ressemble ? rien de ce que j?ai pu voir depuis pr?s de 5?000?kilom?tres. Les flancs bois?s et verdoyants des cha?nes c?ti?res ont laiss? la place ? un paysage purement min?ral. Aust?re et magnifique. En ce jour de Toussaint, le soleil brille dans un ciel sans nuages et procure une chaleur inattendue. Quelques jours avant Istanbul, je conjecturais sur le calendrier et envisageais d?j? l?entr?e en Syrie pour le d?but du mois de novembre. Une pareille ponctualit?, maintenue en d?pit des innombrables al?as de la route, me r?conforte comme une tasse de th? br?lant que l?on avale au c?ur de la temp?te.
La fronti?re ouvre ? 8?heures pile. Ce matin, je suis le premier ? franchir la limite entre les deux pays. Le douanier turc m?a finalement permis de poursuivre la route ? pied. ? condition de ne pas m?arr?ter avant les gu?rites syriennes. La voie ne s?ouvrira aux camions que dans une demi-heure. Cela me vaut une travers?e solitaire sur le mince bandeau de goudron sinueux qui serpente entre les flancs rocailleux et sauvages. Je marche au milieu de la route. Lentement, pour profiter pleinement du silence majestueux de ce passage. Rien de tel que les zones militaires pour pr?server une nature intacte. Au centre du no?man?s?land, les ruines d?un monast?re ajoutent encore ? l??tranget? des lieux.
Sous le double regard du d?funt Hafez al-Assad et de son fils B?chir, actuel homme fort du pays, le douanier syrien v?rifie attentivement mon passeport et le visa obtenu ? Paris?:
??O? vas-tu en Syrie??
??Alep, puis Damas.
??Es-tu d?j? all? en Palestine occup?e??
??Non.
??Iras-tu en Palestine occup?e??
??Je me rends ? Beyrouth, dis-je en indiquant le visa libanais sur la page suivante.
Par chance, je n?ai pas besoin de visa pour entrer en Isra?l, car un tampon de l??tat h?breu m?aurait interdit d?finitivement l?entr?e en Syrie. Le douanier ?tudie ? nouveau soigneusement le passeport. S?il remarque les dates des oblit?rations successives, il peut tracer mon parcours depuis la Roumanie. J?esp?re qu?il manquera suffisamment de perspicacit?. Dans mon sac, j?ai dissimul? mes lettres de recommandation pour J?rusalem, mais la cachette ne r?sisterait pas ? une investigation s?rieuse. Le douanier est-il dupe?? Mes d?n?gations sur Isra?l ont-elles ?t? assez cr?dibles?? Il finit par me tendre mes documents en arborant un large sourire?:
??Welcome to Syria and Lebanon?!
Ouf?! On m?a laiss? passer. Je remarque d?ailleurs que mon homme a spontan?ment joint le Liban ? son pays dans ses mots de bienvenue. Comme pour montrer ? quel point le pays du C?dre n?est qu?une annexe syrienne. Pays arabe, de toute fa?on. En l?espace de 3?kilom?tres, j?ai perdu ma langue. Ma relative aisance linguistique en turc, patiemment et ?prement cultiv?e pendant deux mois, devient subitement inutile et je suis redevenu ignorant comme un nourrisson.
Tout reconstruire une fois de plus. Cette vie est sans piti?.
La voie zigzague ? travers des collines de pierraille d?nu?es de toute v?g?tation. Seul le ruban d?asphalte y trace une zone de calme. ? Daret Azz?, je me d?bats avec les villageois pour tenter d?obtenir un logement. J?y gaspille les deux derni?res heures du jour. Pour la premi?re fois, je prends conscience d?une contrainte nouvelle?: ces hommes ont peur. Peur de moi. Peur, surtout, des ennuis que je risque de leur attirer. Un Occidental qui r?clame l?hospitalit? dans un village frontalier, c?est louche. On veut m?envoyer au hameau suivant qui s??tale au pied de la citadelle de Saint-Sim?on, un ancien monast?re transform? en place forte et d?sormais en ruine. Ce monument figure sur la liste des excursions touristiques, mais je ne dois pas m?attendre ? trouver un h?tel au village car Alep n?est ?loign? que d?une quarantaine de kilom?tres et les visiteurs font l?aller-retour dans la journ?e. J?argumente en vain. Il faut l?cher prise et je me remets en route entre chien et loup. Jusqu?? pr?sent, j?ai eu beaucoup de chance. Mais peut-?tre ce soir devrai-je dormir dehors. Cela ne me plairait gu?re pour la premi?re nuit dans un pays inconnu et intimidant. Tout en allongeant le pas, j?observe les abords de la route, ? la recherche d?un abri de fortune. Rien. Rien que des cailloux. Un terrain nu et accident?, qui n?offre aucune protection. Aucune cachette pour m?abriter des regards indiscrets et des chiens errants.
J?aurais bougrement besoin d?un deus ex machina.
Tandis que j?aborde une ultime c?te avant d?arriver au hameau de Deir al-Samaan, un homme d?une cinquantaine d?ann?es me rattrape ? bicyclette et m?apostrophe en anglais?:
??O? vas-tu??
??Je cherche un abri pour la nuit. Y a-t-il une sorte d?h?tel au village??
??Non, mais si tu veux, tu peux venir dormir ? la citadelle. Je suis le gardien de nuit du mus?e et je vais justement prendre mon travail.
??Vraiment??
??Je connais un chemin d?tourn? pour p?n?trer dans l?enceinte. Nous allons entrer ensemble et je te cacherai dans les ruines. Tu m?attendras l?, le temps pour moi de v?rifier que le directeur est parti. Si tout va bien, je viendrai te chercher. »
(p.?193-195)

Jandarma (p.?148-150)
Les roses de Quasimodo (p.?167-170)
Extrait court
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