Stéphane Allix

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Salle d’attente de mollah Omar, à Kandahar (Afghanistan)
Année 1995
© StĂ©phane Allix
Journaliste. A enquĂŞtĂ© durant treize ans en Afghanistan. A cofondĂ© et dirige l’Institut de recherche sur les expĂ©riences extraordinaires.

L’aventure taliban :


« Sur les routes d’Afghanistan, on ne compte pas en kilomètres mais en heures ou en jours. Alors, quand on est parti avec le lever du soleil, il vient un moment au-delà duquel on ne regarde plus sa montre. Les heures s’Ă©grènent, mais l’on sait que la destination ne sera atteinte qu’à la nuit tombĂ©e, ou le lendemain, peu importe. À quoi bon regarder deux aiguilles faire des ronds ? On est ballottĂ© par les cahots du chemin, une brise de montagne entre dans l’habitacle, chargĂ©e d’un peu de poussière, et vient rafraĂ®chir la nuque. On traverse un autre temps, un monde oĂą tout est plus lent. On s’arrĂŞte sur le bord de la route de terre, oĂą se tient un bâtiment de torchis qui ouvre sur une vĂ©randa. À l’une des extrĂ©mitĂ©s, un lavabo d’Ă©tain est fixĂ© à un montant en bois. Une savonnette sèche et fendillĂ©e, un torchon noir de crasse. Je laisse couler l’eau fraĂ®che dont je m’asperge le visage. Je m’essuie les mains sur mon châle. Sur la vĂ©randa, un brasero fume, et un pouilleux Ă©dentĂ© salue notre arrivĂ©e, assis depuis des siècles contre un samovar dĂ©mesurĂ©. C’est le maĂ®tre immuable du thĂ© dont on peut choisir la couleur : vert ou noir. La route afghane rend saoul. Je m’assieds, les jambes ballant sur la rue, et contemple les montagnes. Les hommes me regardent avec un intĂ©rĂŞt courtois. Le chauffeur commande pour moi du riz avec un peu de mouton cachĂ© dessous, ainsi qu’un grand pain plat qui fera office de couvert. Je suis heureux. Je suis sur les routes d’Afghanistan. »


Extrait de :

Afghanistan, Visions d’un partisan
(p. 69, TransborĂ©al, ? Visions Â», 2003)

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