Né à Cheker, en Kirghizie soviétique, en 1928, Tchinguiz Aïtmatov vit une enfance douloureuse dans l’Union soviétique de l’entre-deux-guerres : il n’a pas 10 ans lorsque son père, haut fonctionnaire soviétique, est fusillé comme ? ennemi du peuple ». Durant la Grande Guerre patriotique, il remplace aux champs les cultivateurs envoyés sur le front, puis obtient le poste de secrétaire du soviet local. La paix revenue, il entreprend des études à l’Institut agricole de Frounzé, aujourd’hui Bichkek, capitale du Kirghizistan. Il devient ensuite journaliste et commence à écrire, en kirghize puis en russe. Il est finalement admis en 1956 à l’Institut Gorki de Moscou. Il s’y fait remarquer par ses nouvelles et de courts romans, notamment Djamilia (traduit en 1959 par Louis Aragon), qui dépeignent magistralement l’Asie centrale de la période soviétique.
Tchinguiz Aïtmatov obtient ainsi le prix Lénine (équivalent russe du Nobel) en 1963 avec son recueil Nouvelles des montagnes et des steppes. Son œuvre se construit, imprégnée de steppe, de loups, de neige et de vent (son grand-père était berger nomade), mais aussi de dissidents et de trafiquants de drogue, de religieux réprimés et de petites gens sacrifiées sur l’autel de l’Ordre rouge.
Dans les années 1980, sans pour autant se révolter, Tchinguiz Aïtmatov devient le porte-parole d’une génération de Soviétiques aspirant à l’ouverture. Mikhaïl Gorbatchev le prend comme conseiller avant qu’il n’entame, en 1990, une carrière diplomatique en tant qu’ambassadeur de l’URSS puis de la Russie au Luxembourg jusqu’en 1994. Il représente ensuite son pays à Bruxelles auprès de la Belgique, de la France, du Luxembourg et des Pays-Bas. Il décède d’une inflammation pulmonaire à Nuremberg en 2008 et laisse une œuvre aussi importante que méconnue avec, pour chef-d’œuvre, Adieu Goulsary.