Albéric d’Hardivilliers

Introduction :

« Je n’ai lu, à l’âge où on les lit habituellement, ni Jules Verne ni Stevenson, et les cartes ne m’indiquaient que de douloureuses heures de géographie scolaire ; il n’y a pas eu non plus d’histoires qui auraient pu me conduire à partir ni de héros à imiter, et ce n’est que bien après, au retour souvent, que certains noms sont revenus avec une troublante insistance pour dessiner autour de moi un cercle bientôt familier.
Rapidement, Raymond Depardon et Nicolas Bouvier sont devenus, non pas des modèles à suivre, mais des voix dans lesquelles j’ai reconnu un écho où m’accrocher. Je n’ai lu qu’assez tard Sur la route et, pour être honnête, ce fut plus par obligation qu’autre chose. On ne devrait pas lire dans ces conditions : je m’ennuyai et le refermai à la page cent soixante-dix sur cette question de Kerouac restée en suspens : “Vers quel séjour diriges-tu tes pas ?” Pourtant, longtemps après, quelque chose est venu me frapper qui n’était sans doute, à travers cette voix, qu’un rendu particulier du temps, une certaine consistance de l’air à une certaine heure du jour – et je n’en demandai pas plus. C’est ce qui m’a plu aussi je crois dans les images de Depardon, non pas le détail exotique auquel je n’ai jamais accordé beaucoup d’importance, mais une mise à disposition qui lui permettait de s’arrêter par moments sur un paysage sans évidence. »