Interviews


Au large de la Tasmanie (Australie)
Année 1990
© Patrick Fradin

Christophe Houdaille – Une passion hauturière
propos recueillis par Matthieu Delaunay

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D’où vient votre passion pour la voile ?
Le rêve et l’imaginaire ont certainement beaucoup contribué à cette attirance pour la vie en mer. La voile et la mer sont très liées pour moi : jouer avec le vent, le dévier avec doigté pour que vogue mon voilier. Et j’aime la mer en tant que paysage. C’est un événement empli de joies et de promesses : l’eau est claire, il y a presque toujours un fond de houle, des vagues plus grosses, un vent régulier, un horizon sans limites. J’ai toujours été fasciné par la houle qui offre un décor magique, une image de puissance éternelle.

Entre la navigation hauturière et un séjour statique à bord d’un voilier, quelle expérience aimeriez-vous renouveler ?
Avec l’âge, je me sens davantage attiré par le séjour statique ou les randonnées à terre. Le déplacement instantané tue l’aventure, le rêve, voire simplement l’esprit d’un périple. Deux voyages comme mon séjour d’un an aux Kerguelen et mon tour du monde sans escale sont complètement différents. Le premier est un voyage de découverte, avec un regard constamment tourné vers l’extérieur, vers l’île que l’on apprend à aimer. Le second est un voyage intérieur, un défi.

Quel parfum trouvez-vous à la navigation en solitaire ?
La navigation en solitaire est le dialogue entre un individu, un voilier et la mer. Naviguer en équipage compromet l’attention au monde extérieur. Techniquement, la navigation en solitaire est un peu plus difficile mais lors d’une traversée, la différence n’est pas considérable. À l’approche des côtes, en revanche, c’est plus compliqué : les manœuvres sont délicates, surtout lorsqu’il faut mouiller dans des conditions malaisées, veiller toute la nuit lors d’un coup de vent. Mais quelle fierté d’y parvenir seul !

Quel fut pour vous le moment le plus marquant de votre vie de marin ?
Ils sont si nombreux ! Les deux concepts qui me tiennent à cœur sont l’idée de voyage absolu et la beauté des manœuvres. Le voyage absolu c’est, par exemple, un tour du monde sans escale comme celui que j’ai accompli des Malouines à la France. Dans ce cas, ce qui importe c’est la liberté d’esprit. La beauté des manœuvres, c’est défiler devant une côte, voiles blanches bien établies, manœuvrer au plus près des roches, s’engager sans bruit entre des îlots où paressent quelques phoques…

Avez-vous une affinité particulière pour la littérature marine ?
Adolescent, je dévorais les ouvrages de Gérard Janichon et de Bernard Moitessier. Récemment, trois ouvrages m’ont plu : Périple de Beauchesne à la Terre de Feu (Transboréal) et Voyages de Vasco de Gama (Chandeigne), deux beaux livres du fait de la véracité du récit et de leur grande simplicité. Enfin, Hommes et navires au cap Horn (MDV), de Jean Randier, qui a effectué un travail d’archiviste colossal. Grâce à ce livre d’histoire – écrit par un marin –, j’ai notamment pu comprendre le formidable assemblage du gréement des grands voiliers d’antan.
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