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À pied à travers Madagascar
par &
le jeudi 7 décembre 2006 à 20 heures 30


Quatrième île au monde par sa superficie, Madagascar est une terre de contrastes. Tout d’abord par son relief, principalement constitué de hauts plateaux mais qui s’affaisse par paliers à l’ouest pour se muer en plaines sédimentaires sur le littoral du canal de Mozambique. À l’est, entaillée de profondes ravines et ponctuée de cuvettes marécageuses, l’épine dorsale volcanique et granitique de l’île, qui culmine à 2 876 mètres au pic Tsaratanana, plonge brutalement dans l’océan Indien en formant une étroite bande côtière doublée de lagunes. Terre de contrastes par son climat aussi : le sud de l’île est aride tandis que les hautes terres tempérées se couvrent d’une savane plantée de baobabs et que la façade orientale, où soufflent les vents de mousson, est envahie par une forêt dense, zébrée de torrents, où vivent de nombreuses espèces animales protégées, comme les lémuriens. Terre de contrastes par son économie ensuite : malgré d’importantes richesses naturelles (mica, chrome, graphite, pierres précieuses), une nature endémique et une terre fructueuse, l’« île Rouge » compte parmi les quinze nations les plus pauvres de la planète.
Après une décennie de colonisation et trente ans de communisme, le pays s’insère doucement dans le monde capitaliste en ouvrant ses frontières. Une agriculture d’exportation (café, tabac, canne à sucre, coton, vanille selon les régions) continue de se développer mais l’essentiel de l’activité économique repose encore sur une agriculture vivrière (riziculture et élevage bovin) ; or les paysans manquent cruellement de terres arables.


Lydie Bertrand et Cécile Clocheret souhaitaient vivre une expérience forte, une aventure inoubliable. Durant quatre mois, de novembre 2005 à février 2006, elles ont marché 1 500 kilomètres de Fort-Dauphin à Fénérive-Est, en passant par Tuléar, Fianarantsoa et Tananarive. En se ravitaillant lors d’étapes, en dormant sous tente, en s’orientant à l’aide d’un GPS, elles traversent les régions de jungle, les zones désertiques ou montagneuses et les plaines côtières qui font du pays malgache une mosaïque géographique d’une rare diversité. Elles souhaitaient également recueillir le témoignage de ceux qui mènent sur place des initiatives concrètes pour un développement responsable et respectueux. Leur film et leurs photos dévoilent des initiatives personnelles concrètes, des projets villageois de développement, l’espoir de populations maritimes ou rurales isolées. Les deux voyageuses découvrent des idées innovantes, pérennes et adaptables dans d’autres régions du monde (la relance du tapis mohair disparu, l’exploitation nouvelle du concombre de mer, un cinéma itinérant de brousse, la culture de plantes médicinales comme le vétiver ou la Jatropha).
Lydie Bertrand et Cécile Clocheret vont à la rencontre des dix-huit ethnies aux origines diverses qui peuplent ce territoire afro-asiatique une fois et demie plus grand que la France : 1 500 kilomètres de brousse et de pistes les conduisent vers des villages isolés où les marchandises se transportent souvent à dos d’homme. Elles arpentent d’abord le grand sud, l’Androy, « la région des épineux », la plus aride et la plus pauvre du pays. Les Antandroy – « forts », « fiers » – sont un peuple de guerriers et de légendes. Ils ignorent bien sûr le français, peinent à comprendre la démarche des voyageuses et sont intrigués par leur matériel de bivouac… La plupart n’ont jamais vu de Blancs. Mais, d’ouï-dire, un Blanc ne marche pas ; il se déplace en voiture ! Elles progressent ensuite dans les hautes terres, succession de plateaux, de canyons, de montagnes et de falaises vertigineuses. Les villageois y trouvent de l’eau à profusion et s’en servent pour cultiver des pois, du maïs et des bananes. C’est le domaine des Bara qui, malgré leur réputation de bandits (le vol de zébus était traditionnellement la marque de mérite et de virilité), se révèlent être de biens pacifiques et généreux éleveurs de vaches.
Lydie Bertrand et Cécile Clocheret gagnent ensuite le pays des Tanala – « ceux de la forêt » –, sur la côte, marquée par les ravages de la déforestation. Il reste à peine 15 % de la forêt primaire originelle. La culture sur brûlis, la fabrication de charbon de bois, la coupe des essences précieuses sont les principales raisons du désastre. Puis l’unique route nationale du pays, que les marcheuses empruntent sur plusieurs dizaines de kilomètres, leur offre l’occasion de se pencher sur une autre facette de Madagascar. Car si la brousse apporte son lot de surprises et d’espoir, la ville, elle, dévoile sans pudeur sa tristesse, sa misère, ses inégalités.
Enfin, les deux voyageuses pénètrent une contrée dépeuplée, couverte d’une jungle tropicale. Elles foulent les rives du lac Alaotra d’où, quarante ans auparavant, trois trains de fret reliaient quotidiennement la capitale. Les pourtours du lac, mis en valeur grâce à un système de digues et d’irrigation, étaient le grenier à riz du pays. De cette époque, il ne reste rien : en trois décennies de dictature et de corruption, le système du président Ratsiraka a pillé les richesses de l’île. Et même si ce régime est tombé en l’an 2000, le pays peine à se redresser.
Amies de longue date, Lydie Bertrand et Cécile Clocheret s’engagent ensemble dans des projets de sensibilisation aux autres cultures. Au Mexique, en 2000, elles travaillent pour la Fédération internationale des droits de l’homme (FIDH). Au Guatemala, elles s’immergent ensuite pendant un an dans une communauté autochtone au nord du pays où elles filment le travail des médecins traditionnels. Elles réalisent deux documentaires dont un sur les coutumes indigènes et leur adaptation à la modernité, Les Mayas en baskets. En 2005, elles décident de partir à Madagascar. À Paris, Lydie Bertrand s’occupe de l’animation de l’Association française de communication interne (AFCI) ; Cécile Clocheret partage son temps entre la production et la réalisation de documentaires.







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DVD des intervenantes en rapport avec cette conférence :
L’Île Rouge, pas à pas, 1 500 km de rencontres


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